Wau Holland, un des fondateurs du Chaos Computer Club, meurt à 49 ans. Ses funérailles auront lieu dans sa ville natale de Marsburg, grâce à une collecte de fonds sur le Réseau.
Il l’avait compris avant tout le monde : les ordinateurs ne sont pas réservés aux entreprises et à l’armée, ce sont des moyens de communication et d’émancipation politique pour tout un chacun. Wau Holland, de son vrai nom Herwart Holland-Moritz, est mort dimanche 29 juillet, des suites d’une attaque cardiaque, survenue le 27 mai. Sa disparition survient 21 ans après qu’il ait cofondé, en Allemagne, le Chaos Computer Club, aujourd’hui le plus grand collectif de hackers du monde. À 49 ans, il était une sorte de parrain et d’âme du mouvement allemand, dont le porte-parole Andy Müller-Maguhn est le représentant élu de l’Europe au très officiel ICANN. Lors du dernier congrès annuel du CCC, tenu du 27 au 29 décembre dernier à Berlin, il était toujours là, à discuter de tout avec tous. Ce gros et grand bonhomme, un original barbu éternellement en salopette, regardait, alors avec tendresse la jeune génération du CCC, celle qui usine dans les start-ups et n’a pas eu à se battre pour l’accès aux ordinateurs et aux réseaux : "Durant toutes ces années, nous avons appris comment monter des manifestations de hackers. Maintenant, nous avons appris à les organiser de façon élégante", répondait-il à ceux qui lançaient la polémique sur l’hypertrophie du Club et son nouveau penchant festif.
Hacker à l’européenne
Parmi ses nombreux faits d’arme, on compte le "Btx hack", perpétré avec Stefan Wernery, l’autre tête des premières années du CCC : en 1984, quand l’Allemagne installe son réseau minitel, ils détournent 130 000 DM de la caisse d’épargne de Hambourg vers le compte du CCC, qu’ils rendent aussitôt après avoir publié un communiqué sur les failles de sécurité du système. Il continuait aujourd’hui à être membre de ce Club des "Robin des bois du Net", sans responsabilité particulière, donnant toujours l’image du hacker moderne à l’européenne : un état d’esprit de curiosité et d’ouverture, croisant politique, social, culture et technologie, à des années lumière de la révolte adolescente paranoïaque des scripts kiddies américains.
Tu vois cette grosse armoire ?
Observateur poétique et caustique, il trouvait de la beauté et de l’ironie dans des détails frappants. "Tu vois cette grosse armoire ?, demandait-il, hilare, en pointant un cube métallique planté dans un coin du quartier général du CCC Berlin. C’est un VAX, les systèmes informatiques les plus puissants du monde dans les années 80. On pouvait faire des années de taule pour y avoir pénétré. On l’a acheté aux puces une bouchée de pain. C’est pour la déco..." Sur son site, le livre de condoléances virtuel a déjà recueilli plus d’un millier de contributions de toute la communauté, qui a propagé la triste nouvelle dans les mailing-lists alternatives. Les funérailles de Wau Holland auront lieu dans sa ville natale de Marsburg, grâce à une collecte de fonds en cours sur le Réseau. Dans dix jours, Hackers@Large, la grand-messe des hackers européens qui se tiendra en Hollande, lui rendra hommage. "Ne faites quand même pas un truc trop triste", aurait sûrement remarqué Holland, éclatant de son rire aigu.
Hackers @ Large 2001:
http://www.hal2001.org
Chaos Computer Club:
https://www.ccc.de
Le site de Wau Holland (hommage et condoléances):
http://wauland.de/