Les deux gamins qui ont fait si peur à la Maison Blanche passent devant les juges. Entre mythe et réalité...
Jeudi 14 juin, le verdict du tribunal de Kfar Saba, près de Tel-Aviv, est tombé : 6 mois de travaux d’intérêt public, deux ans de prison avec sursis et 75 000 shekels (18 500 dollars) d’amende pour Ehud Tenenbaum. En 1998, ce pirate informatique israélien avait infiltré quelques centaines de serveurs de l’armée américaine. Ce garçon de 21 ans s’était fait connaître sous le pseudonyme de "Analyzer". Dans ses attendus, le tribunal a souligné que l’accusé "avait causé de graves dégâts au sein d’une institution importante d’un pays ami". Analyzer avait fait la Une de tous les journaux à travers la planète. C’était le premier pirate à faire trembler la Maison Blanche. On pourrait aussi dire qu’il fut le premier prétexte permettant aux ...tats-Unis d’exposer, à grand renfort de FUD, leur crainte d’être victimes d’un Pearl Harbor électronique. Il n’avait pourtant pas fait grand chose de plus que de récupérer une liste de serveurs en .mil (militaires) et d’exploiter une vulnérabilité connue. Ne perdons pas de vue que ces serveurs ne pouvaient contenir aucune donnée classée secret-défense puisqu’ils étaient connectés au Net. Il s’agissait de "plaquettes" électroniques pour les différentes armes de l’Armée américaine. Le seul mérite de ce "script-kiddy" est d’avoir su occuper le devant de la scène médiatique à un point jamais atteint jusqu’alors.
Mafiaboy s’est tiré avec la caisse ?
Coïncidence amusante, on assiste au même moment à la fin du procès d’un autre gamin de 16 ans, connu sous son seul pseudo : Mafiaboy. Selon l’accusation, ce jeune Canadien serait l’auteur du grand ralentissement de février 2000 (l’attaque par déni de service) qui avait frappé plusieurs sites phares comme Yahoo !, E*Trade, CNN, eBay. On assiste dans ce procès à la matérialisation de tous les fantasmes liés au piratage informatique : un adolescent capable de paralyser la nouvelle économie (qui s’est, soit dit en passant, paralysée toute seule) avec un petit programme informatique. C’est le film War Games pour de vrai. Pour des incultes en informatique, c’est pain béni. Les entreprises et les pseudo-experts avaient ainsi parlé de 1,7 milliard de dollars américains de dommages. Pour ne retenir finalement que 10 millions aujourd’hui. On se demande où est passée la différence... Pas dans la poche de Mafiaboy, en tout cas.
Si l’on revient sur Terre deux minutes et que l’on s’en tient aux vrais chiffres, voici ce qu’a coûté la paralysie de Yahoo, eBay, E*Trade et Amazon : considérons que les sites ont été bloqués 3 heures au total, que la moyenne du chiffre d’affaires perdu sur ces quatre sites est de (chiffres réels) 322 374 dollars (2,4 millions de francs), qu’il y a eu environ 10 sites touchés, cela nous fait 3,22 millions (24 millions de francs). À quoi l’on peut ajouter environ 70 323 dollars (527 000 francs) par site en consulting sécurité et autres achats matériels après le problème. Total : 3,9 millions de dollars (29 millions de francs) en comptant large... On peut en outre considérer que cette histoire a fait énormément de publicité (gratuite) aux sites en question. Argent économisé en encarts publicitaires qui ne sera pas versé au crédit du jeune homme...