Une disposition du projet de loi sur la société de l’information a été adoptée en douce jeudi 10 mai à l’Assemblée nationale. Elle facilite les investissements des collectivités locales dans les réseaux à haut-débit.
La fameuse loi sur la société de l’information serait-elle en voie d’être saucissonnée pour être ingurgitée plus aisément par des députés au menu très chargé ? Une disposition en tout cas, s’est échappée de la future LSI pour se retrouver dans un projet de loi "portant diverses mesures d’ordre social éducatif et culturel". Adopté en première lecture à l’Assemblée jeudi 10 mai, c’est un vaste fourre-tout législatif, pratique pour faire passer en urgence toutes sortes de dispositions. Parmi lesquelles figure la possibilité pour les collectivités locales d’investir dans des infrastructures de réseaux de télécommunication pour le haut débit. Par exemple la fibre optique. Défendue en séance par Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication, cette mesure soudaine visait en fait à contrecarrer l’initiative d’un député de l’opposition, Patrice Martin-Lalande (RPR). Quelques jours plus tôt, il avait déposé un amendement qui avait été adopté par la commission,. Au jeu des manœuvres politiciennes, le gouvernement a voulu éviter de se faire doubler.
Des solutions rapides
Pour le député (et ancien maire de Lamotte-Beuvron) Martin Lalande, l’enjeu réside dans la possibilité pour les collectivités locales de participer au financement de la couverture des zones jugées non-rentables par les opérateurs de télécommunications. Pour l’instant, elles peuvent uniquement le faire dans le cadre d’un constat de carence, c’est-à-dire en absence manifeste de tout opérateur sur le marché. Une situation qui, selon certains, a été délibérément prolongée pour favoriser France Telecom, libre de facturer le tarif de son choix pour réaliser les travaux. L’optique a changé avec l’inclusion dans l’avant-projet LSI d’une disposition adoucissant le cadre légal. Mais pour Patrice Martin-Lalande, celle-ci arrive trop tard : "la LSI ne sera pas adoptée avant un an et demi au mieux. Son principe même est ridicule puisqu’elle part dans tous les sens. Or on a besoin de solutions rapides".
Dépassé par la boucle radio ?
Si elle est adoptée définitivement, la mesure devrait donc satisfaire tout le monde excepté France Telecom. D’après un observateur, elle devrait rassurer les collectivités locales échaudées par le procès intenté il y a quelque temps par l’opérateur public à la communauté urbaine de Nancy, qui avait osé créer son propre réseau haut débit. Mais l’agitation législative répond-elle davantage à un besoin réel où des arrière-pensées politiques ? D’après Laurent Chemla, qui participe au projet d’accès Internet à bas prix baptisé Gitoyen, la nécessité de poser davantage de fibre optique dans le sol des communes françaises n’est plus capitale, du fait du développement, dans les prochains mois, de la boucle locale radio, qui permet la transmission d’informations à haut débit par voie hertzienne. Selon lui, "cet amendement aurait du être adopté il y a trois ans". Pour le reste, on peut se demander si d’autres dispositions prévues dans la LSI seront ainsi votées, dans les méandres de la tactique législative.