Nature, le prestigieux magazine scientifique, organise un vaste forum sur l’édition en ligne des publications de chercheurs. Un domaine en plein boom où les intérêts économiques des éditeurs traditionnels sont confrontés au principe du libre accès au savoir.
"Mouvement brownien". C’est sous cette appellation poétique que le rédacteur en chef de Nature, LA revue scientifique de référence, introduit le débat organisé sur son site à propos de la publication en ligne des travaux des chercheurs. Pour cette revue, dont l’accès aux archives est encore payant, l’émergence de nouvelles bases de données gratuites et de sites d’archivage comme BioMed Central est une question épineuse. Pour tenter de cerner les grands mouvements qui se dessinent dans ce secteur en ébullition, elle convie à son forum Future e-access to the primary literature tous les acteurs : une association de chercheurs militants pour un accès totalement gratuit, des bibliothécaires et des éditeurs à but lucratif ou non.
Un paradoxe inacceptable
Depuis les années 70, les abonnements des diverses revues primaires (où les articles sont écrits par des scientifiques pour des scientifiques) ont vu leur prix multiplié par dix en moyenne. La plupart des bibliothèques d’universités et d’organismes de recherches ont donc été contraints de faire leur choix par nécessité économique. Ils dénoncent aujourd’hui le paradoxe sur lequel repose le système. Les revues primaires font, en effet, payer l’accès à des travaux généralement financés par l’argent public, réalisés par des chercheurs qui ne perçoivent pas de rémunération pour la rédaction des articles, ces derniers étant finalement relus par des scientifiques bénévoles. La légitimité de la rétention des articles par ces revues est donc remise en question par des associations de chercheurs. Ainsi, les 13 986 promoteurs du Public Library of Science appellent, sur Internet, à la mise en place d’une bibliothèque universelle qui regrouperait toutes les publications du domaine médical et des sciences de la vie, six mois après leur sortie. Ainsi qu’au boycott des revues qui ne se soumettraient pas à ce système de partage.
Prendre le train en marche
Ce genre de proposition ne ravit évidemment pas les éditeurs traditionnels, comme Nature ou The Lancet. En réponse, ils mettent en avant le risque de faillite de ce genre de sites dont la pérennité financière est encore à démontrer. Par ailleurs, ils s’inquiètent du risque d’altération et d’erreurs qui pourraient se produire lors des copies et reproductions sauvages. Toutefois, de tels sites existent déjà dans le domaine des sciences physiques. Aux ...tats-Unis, la National Science Foundation propose la consultation de ses archives en mathématiques et physique. Le mouvement est donc réel et les éditeurs semblent forcés de prendre le train en marche. Ainsi, le Journal of Biomolecular Chemistry (JBC) propose désormais, en ligne et en libre accès, non seulement ses archives, mais les articles à paraître dans sa revue papier dès lors qu’ils ont été acceptés par le comité de relecture. En Europe, on se réveille doucement. Pour faire face à la suprématie américaine, un projet de serveur électronique de publications primaires est en cours d’élaboration. Il regroupe instituts de recherche, universités et éditeurs sous la dénomination d’E-Biosci.
Les archives des publications en sciences physiques:
http://xxx.lanl.gov/
Le forum de
Nature:
http://www.nature.com/nature/debate...
Le site du Public Library of Science
http://www.publiclibraryofscience.org/