Transfert.net l’annonçait le 21 février dernier : les pertes de Liberty Surf s’établissent à 1,3 milliard de francs pour l’année 2000 et à 1,5 milliard en incluant une provision pour restructuration. Interview de Rafi Kouyoumdjian, le PDG de Liberty Surf.
Rafi KouyoumdjianDR |
Liberty Surf a confirmé, jeudi 5 avril,
l’information annoncée par Transfert le 21 février dernier. Le FAI (Fournisseur d’accès à Internet) français affiche bien une perte de 1,3 milliard de francs (202,8 millions d’euros), à laquelle s’ajoute une provision exceptionnelle de 160 millions de francs (24,4 millions d’euros). Liberty Surf, qui comptait à la fin décembre 761 000 abonnés actifs - Fresbee inclus, a réalisé en 2000 un chiffre d’affaires de 402 millions de francs (61,2 millions d’euros) et disposait début janvier d’une trésorerie de plus de 260 millions d’euros (1,7 milliard de francs). Nommé PDG de Liberty Surf Group et responsable du nouvel ensemble Tiscali France (1), Rafi Kouyoumdjian reconnaît les erreurs de gestion passées, promet la rentabilité pour la fin 2001, mais reste évasif sur l’avenir des salariés de son groupe.
Les pertes de Liberty Surf apparaissent supérieures aux prévisions les plus pessimistes des analystes financiers. Comment expliquez-vous ce chiffre ?
En réalité, nous enregistrons une perte exceptionnelle de 24,4 millions d’euros liée à la réorientation du groupe sur les activités françaises - donc à la restructuration des filiales étrangères (Grande-Bretagne, Suède, Norvège) - et à la dépréciation de notre participation dans le capital de Cyber Press Publishing. Pour le reste, nous en sommes en ligne avec nos prévisions internes, avec une perte d’environ 200 millions d’euros.
Même si l’on ne retient que ce chiffre de 200 millions d’euros de pertes, ne peut-on pas dire que l’entreprise Liberty Surf a été mal gérée en 2000 ?
Cette gestion est à l’image d’une certaine économie de l’Internet, dans laquelle la priorité était au développement et où, plus l’on avait d’argent, plus l’on en dépensait. Ce n’est pas propre à Liberty Surf, c’est à l’image du marché. J’ai pris la direction générale du groupe, en octobre 2000, puis ses commandes à la fin février, avec pour but de mettre Liberty Surf en phase avec des objectifs de rentabilité plus rapides. La rentabilité, qui était annoncée pour 2003, puis 2002, est désormais prévue pour la fin 2001.
Comment comptez-vous y parvenir ?
Tout d’abord, notre chiffre d’affaires se développe fortement, je suis confiant sur ce point. Ensuite, la fusion avec Freesbee et Tiscali va permettre de créer des synergies, en particulier en réduisant - de 50 millions d’euros en année pleine - les coûts techniques et de marketing. Cette baisse de coût est nécessaire et facilitée par la taille que nous atteignons, à savoir un million d’abonnés actifs pour le groupe Tiscali France. Ça permet de faire venir les annonceurs et de recruter de nouveaux abonnés à moindre coût.
Quelles seront les conséquences de ces synergies pour les salariés de Liberty Surf, World Online et Freesbee ?
Chez Freesbee, tout est réglé, l’entreprise est aujourd’hui intégrée dans Liberty Surf. Le personnel de Fresbee - 175 salariés à l’annonce de l’acquisition - a été reclassé en interne ou en externe, à l’exception de 30 personnes. Je pense que les créations de postes permettront de proposer un emploi à certaines d’entre elles. Au final, il y aura très peu de licenciements. Pour le reste du groupe, la décision n’a pas encore été prise.
Les salariés de World Online semblent très inquiets depuis l’annonce de suppressions d’emplois en Belgique et en Suisse.
Je n’ai pas vraiment le sentiment qu’ils soient inquiets. Il est vrai qu’il y a des inquiétudes dans l’ensemble du groupe, mais elle sont à l’image des craintes qui touchent le secteur de l’Internet.
Où en est votre proposition de reprise des activités de l’opérateur téléphonique Intercall ?
Notre proposition est désormais la seule en lice devant le tribunal. Le 12 avril, une assemblée générale des actionnaires d’Intercall doit se prononcer sur une augmentation de capital souscrite par Liberty Surf. Cette dernière est quant à elle conditionnée à la décision du tribunal qui dira, le 24 avril, si notre offre est retenue ou non. Quoi qu’il en soit, nous avons déjà commencé à travailler avec les équipes d’Intercall sur l’organisation future. L’idée, à terme, est d’offrir au grand public une plate-forme de téléphonie prépayée et d’envoi de SMS.
(1) Liberty Surf, Freesbee, World Online France, A Telecom.