Le rachat de Guaranty City par l’américain Gen Re Securities permet à l’incubateur Kangaroo Village de réaliser sa première plus-value sur une de ses participations. Et renforce sa confiance en son business model.
Philippe Hayat est content. Gen Re Securities, gros groupe américain d’ingénierie financière, a finalisé le 16 février dernier l’acquisition de 100 % de Guaranty City, une société qui développe des produits financiers garantis adaptés à internet, pour un montant tenu secret. Or Kangaroo Village, dont Hayat est le PDG, possédait une participation de 15 % dans la start-up : "Nous avions investi un million de francs et sommes très satisfaits du coefficient multiplicateur obtenu dans cette opération." Et d’ajouter, optimiste, "cette sortie constitue un pas important vers l’autofinancement de Kangaroo Village". À ce jour, l’incubateur a levé un total de 25 millions de francs pour se lancer. Mais en rythme de croisière, "nos frais de fonctionnement (loyer, salaires, frais généraux) n’atteignent qu’un peu plus de quatre millions de francs par an, à quoi il faut ajouter le montant de nos prises de participations - entre cinq cent mille et un million de francs en échange de 15 % à 30 % du capital de la start-up, détaille le PDG. Avec une sortie de ce type chaque année, nous couvrons quasiment nos frais de fonctionnement."
Kangaroo Village n’entend donc pas renier son business model fondé sur les plus-values. Des doutes planaient sur son succès, à la suite de la contraction du marché boursier, ayant entraîné une forte diminution des opportunités de sortie en Bourse. D’ailleurs, bon nombre des concurrents de Kangaroo Village (Republic Alley, Tocamak, etc.) se sont lancés dans la prestation de services facturés (recrutement, développement informatique, aide à la levée de fonds...) pour tenter de dégager de nouvelles sources de revenus. "La grande différence entre eux et nous, c’est qu’ils ont des équipes plus nombreuses et donc des frais de fonctionnement bien supérieurs qu’il leur est plus difficile de financer uniquement en tablant sur les plus-values réalisées lorsqu’ils sortiront de leurs participations", estime Philippe Hayat.
Du SMIC à des salaires plus confortables
L’équipe de Guaranty City semble elle aussi satisfaite de l’opération. "Le prix de vente me paraît tout à fait équitable compte tenu du fait que nous avons développé une ingénierie financière innovante et une plate-forme technologique performante, mais n’avons encore dégagé aucun chiffre d’affaires. Pas de quoi devenir riches, mais nous allons avoir les moyens d’accélérer le lancement de notre offre et c’est ça le plus important", estime pour sa part Bertrand Fitoussi, directeur général et cofondateur de Guaranty City.
Contrairement à Kangaroo Village et aux quelques autres investisseurs extérieurs, payés dès la conclusion de la transaction, les quatre fondateurs ne percevront le produit de la vente de leurs actions que dans un an, s’ils n’ont pas démissionné d’ici là. "En attendant, il ne faut pas oublier que nous passons du SMIC à des salaires plus que confortables. Je souhaite à tout salarié de connaître un jour une telle augmentation !", se réjouit Bertrand Fitoussi. Devenue filiale de Gen Re Securities, Guaranty City va être rebaptisée Gen Re Securities S.A. et bénéficier des moyens de sa maison mère. "Nous avons acquis Guaranty City à la fois pour son expertise financière dans le domaine des produits garantis et pour sa plate-forme technologique de distribution via internet, que nous pourrons appliquer à nos autres types de produits financiers", explique Karl Reynolds, responsable des produits structurés chez Gen Re Securities. Et puisqu’il s’agit désormais d’une filiale à part entière du groupe, "nous investirons les moyens nécessaires à son développement, à commencer par l’embauche de deux à trois personnes dans les mois à venir", ajoute-t-il. Guaranty City, qui suit une stratégie de distribution de ses produits par le biais de brokers ou de banques en ligne, a d’ores et déjà trouvé son premier partenaire, mais préfère pour l’heure en taire le nom par peur de la concurrence. Et le lancement devrait intervenir "au cours du premier semestre 20 / 01", espère Karl Reynolds.