Le salon international des contenus interactifs s’est ouvert samedi 10 février, à Cannes. Au cours des débats de la première journée, on a pu, une fois de plus, mesurer l’angoisse de l’industrie du divertissement face à la question des droits d’auteur sur Internet.
Ambiance déménagement au Palais des festivals de Cannes. Le salon international des contenus interactifs (Milia) a ouvert ses portes samedi matin, mais les 800 exposants - venus pour la plupart du monde de la télévision interactive (TAK, Open TV...) ou des jeux vidéo (Infogrames, Electronic Arts, Cryo...) - commencent à peine à déballer leurs cartons, pour quatre jours d’exposition. Le hurlement des scies électriques sur les stands en construction répond en écho aux plages de musique électronique doucereuse, diffusée dans les amphithéâtres du Palais. Ces derniers abritent les "think tanks", principale activité du week-end, au cours desquels quelques sommités débattent de l’avenir des contenus en ligne, et en particulier de l’avenir des droits d’auteur.
Du numérique et du chaos
©Milia 2001 |
"
Napster a changé à tout jamais la donne pour le divertissement", assure, avec une impressionnante perspicacité, James Robinson, le directeur général de cinemaelectric.com. Celui-ci prophétise notre entrée dans une "
post copyright era" (sic). L’accès de chacun aux technologies de diffusion numérique conduit à la contestation du pouvoir des majors de la musique et du cinéma et le monde du divertissement doit se reconstruire, dit-il en substance. Sa méthode ? "
Il faut du numérique, du chaos. Et, surtout, il faut qu’Hollywood arrête de fabriquer à la chaîne des "hits" conçus pour un marché de masse. Il nous faut des talents globaux, mais personnalisés." "
C’est vrai, nous diffusons d’ailleurs près de 40 % de titres auto-produits, enchérit Adriano Marconnetto, le cofondateur italien de Vitaminic, une plate-forme d’agrégation et de diffusion de musique.
Et je pense que la diffusion directe de musique en ligne - sans intermédiaire - va décoller dans les prochaines années. Il se peut donc que les majors fassent moins d’argent qu’avant, mais, du coup, peut-être que de nouvelles entreprises en feront davantage."
Les majors se crispent
Ces propos, en apparence iconoclastes mais tout de même savamment "marketés", semblent agacer Joerg Pfuhl, l’un des dirigeants de l’éditeur Random House (groupe Bertelsmann, qui a récemment pris le contrôle de Napster). "Dans le domaine de l’édition, le copyright n’est pas mort, se défend-il. Loin de nous desservir, le numérique permet du reste aux éditeurs, et pour la première fois, de connaître leurs clients. Nous savons désormais qui ils sont, ce qu’ils lisent, ce qu’ils aiment. C’est pour nous un formidable outil de marketing." Le débat s’achève et laisse sur sa faim. Qu’ils appartiennent au cercle des grands industriels du divertissement ou à celui des jeunes pousses opportunistes, les intervenants n’ont qu’effleuré la question des droits d’auteurs sur Internet. À aucun moment n’ont d’ailleurs été prononcés les termes "auteur", "création", "lecteur" ou "spectateur"... "En fait, ils sont bien plus préoccupés, voire angoissés, par l’idée de trouver rapidement un modèle économique, lâche un congressiste. Ce qu’ils veulent, c’est faire de l’argent au plus vite avec les nouveaux médias." Et tordre définitivement le cou aux pratiques du tout-gratuit sur Internet.