Jean Ferrat intente un procès au site associatif Music-contact et à son hébergeur, I(France). Leur tort : avoir mis en ligne les textes d’une cinquantaine de chansons... en hommage à l’artiste.
Laurent Monnier ne comprend toujours pas ce qui lui arrive. "Le 24 octobre dernier, un huissier s’est présenté au siège de l’association Music-contact et m’a remis une assignation à comparaître devant le tribunal de grande instance de Paris, à la demande de Jean Ferrat et des productions Meys, des productions Alleluia et de la société TEME." Dans le même temps, I(France), qui héberge le site, reçoit un courrier identique. "Le montant des sommes demandées avoisine le million de francs !", s’exclame Laurent Monnier. "C’est parfaitement scandaleux, continue Thierry de Passemar, directeur général d’I(France). Nous sommes très choqués par l’attitude de ces personnes, qui ont systématiquement refusé tout type de conciliation." Selon lui, ils n’auraient même pas cherché à prendre contact avant d’entamer la procédure.
Démarche positive
L’objet de litige ? L’interprète de La montagne et ses éditeurs reprochent à Laurent Monnier d’avoir reproduit sur son site, sans autorisation de l’auteur, les textes de 54 chansons. Or, c’est contraire à la loi et la jurisprudence en la matière est claire. En 1996, une première décision du tribunal de grande instance de Paris - dans une histoire un peu similaire, à propos de chansons de Jacques Brel - reconnaissait qu’il y avait "contrefaçon d’œuvres protégées par le droit d’auteur dès lors que celles-ci étaient, sans autorisation des titulaires des droits, mises à disposition des utilisateurs de l’Internet". Dans le cas Jean Ferrat contre Music-contact, Laurent Monnier ne nie pas les faits, il avoue même volontiers avoir reproduit les paroles sur son site. Mais il tient à préciser qu’il a contacté la Sacem pour connaître les démarches à accomplir. "Ils m’ont tout bonnement répondu que la Sacem ne gérait pas ce genre de problèmes et qu’il fallait voir avec les auteurs. Comme je ne connaissais pas tous les auteurs ou les ayants droit des textes des chansons de Ferrat, j’ai aussi demandé à la société de gestion de me donner les contacts de tous les auteurs. Réponse : non, c’est contraire à nos statuts." Le Code de la propriété intellectuelle stipule pourtant dans son article L-321-7 que toute société de gestion collective est tenue de les communiquer à tout utilisateur potentiel de son répertoire.
Autre zone d’ombre : une partie des textes des 54 chansons mises en ligne par Laurent Monnier ne sont pas écrits par Jean Ferrat, mais par Louis Aragon, décédé en 1982. A priori, c’est aux héritiers de l’écrivain de réagir. Pour Thierry de Passemar, le problème n’est pas là : "le site Music-contact voulait rendre hommage à Ferrat en publiant ces textes. C’est une démarche positive, sans but lucratif. Monnier est un fan, il ne cherchait pas à se faire de l’argent."