En France, le piratage de DVD est peu développé, mais la protection par "zonage géographique" est déjà inefficace. Les disques des derniers films américains traversent allègrement les frontières...
Le
piratage n’est pas encore un problème
central en France. Les graveurs de DVD coûtent
au minimum 50 000 F, ce qui dissuade les pirates.
De surcroît, un DVD vierge coûte 200
F, alors qu’un titre enregistré ne coûte
que 150 F...". Arnaud Groschtern, PDG
de Genedis,
lun des principaux grossistes français
en DVD, est confiant dans la technologie élaborée
par le Consortium DVD. "La macrovision protège
assez bien, poursuit-il. De toute façon,
les copies illégales ne peuvent pas être
de vrais DVD. On perd toute linteractivité
du numérique en le transférant sur
un support analogique. Larborescence avec
un menu et des fichiers disparaît. On ne peut
plus accéder à des bonus,
tels que la bande annonce du film, les scènes
coupées au montage qui figurent en hypertexte
sur le disque. On ne peut plus changer la langue,
ni les sous-titres."
99 % de DVD piratés en Ukraine
À lAssociation
de Lutte contre la piraterie audiovisuelle (ALPA),
on tient un langage un peu moins rassurant. Selon
Jean Sainati, délégué général,
10 % du chiffre daffaires français
du DVD serait détourné par le piratage.
La France figure parmi les pays les moins touchés,
les pires exemples se trouvant en Ukraine (99 %),
en Russie (85 %), et pour lEurope, en Italie
(30 %). La Suède et la Norvège, avec
chacune 5 % de leur marché piraté,
sont les plus vertueuses.
"Nous navons pas encore, chez nous,
la filière de pressage de DVD illégaux
de Hong-Kong et de la Chine, mais cela nous pend
au nez, salarme Jean Sainati. À
Paris, on presse des VCD pirates dans les quartiers
chinois le VCD est une technologie antérieure
qui sest surtout développée
en Asie. Mais la plupart des trafiquants dupliquent
en analogique. Il y a actuellement un parc de 18
millions de magnétoscopes en France, contre
à peu près un million de lecteurs
de DVD. Faire du magnétique est donc toujours
une bonne affaire."
Le monde, divisé en six zones
La plupart des Français préfèrent
donc encore acheter leurs DVD. Le trouble nest
pas aussi grand que dans lunivers du CD, où
la vogue du MP3 et des graveurs a déjà
fait chuter les ventes. En fait, Hollywood craint
surtout que le DVD ne fasse concurrence aux films
projetés sur grand écran. Car cette
technologie a donné aux amateurs un moyen
supplémentaire de contourner la "chronologie
des médias" : le délai légal
à respecter avant de pouvoir commercialiser
un film sur cassette VHS ou DVD. En France, ce délai
est de neuf mois à compter de la sortie en
salles.
Pour sassurer que la "chronologie
des médias" soit respectée,
le Consortium DVD a divisé le monde en six
zones, correspondant à six types de lecteurs
DVD. Les fabricants intègrent une puce à
leur lecteur, ou bien un codage logiciel, de sorte
quun lecteur "zone 2", cest-à-dire
européen, ne puisse lire un disque "zone
1" sorti aux ...tats-Unis. Un Français
devra donc théoriquement attendre la parution
du film en DVD "zone 2" pour le
visionner (voir article de Transfert : Le
DVD est crackable !).
Les lecteurs réservés aux Américains
sont disponibles en France !
Mais il est déjà possible de se procurer,
en France, les lecteurs et les disques "zone
1". Rappelons que le zonage est le fruit
dun accord contractuel conclu au sein du Consortium
DVD. Il ne revient pas à la police de contrôler
lapplication de cet accord. Aussi, plusieurs
fabricants ont choisi de construire des lecteurs
"multizones". À Paris, certains
magasins spécialisés offrent de "dézoner"
les lecteurs. On trouve même des petites annonces
en ce sens dans des revues professionnelles comme
Les Années Laser.
Une fois équipé dun lecteur
américain, lacheteur français
peut commander sur Internet des titres à
peine sortis aux ...tats-Unis, et activer la
fonction multi-langage pour obtenir une version
en gaulois. Il choisit alors de se mettre hors-la-loi.
En revanche, la responsabilité pénale
des vendeurs de lecteurs "zone 1"
ne peut pas être engagée puisquelle
na pas de fondement législatif.
La chronologie des médias vacille
Ce problème est parfois accentué par
les accords dont disposent les distributeurs. Exemple
: les grands magasins, de type Fnac ou Virgin, sont
autorisés à vendre des titres américains
pas encore sortis dans les salles en France, à
condition que le DVD ne comporte pas de version
traduite en français. La ruse est belle :
le film nest pas passé devant la commission
qui accorde les visas dexploitation car son
travail de classification et dagrément
se limite aux uvres doublées ou sous-titrées
en français... Le film non-examiné
nest pas concerné par la chronologie
des médias à la française.
Ironie du zonage... Vous y aviez cru, vous, que
le DVD était une technologie "in-vi-o-lable"
?