Messieurs les Anglais, clonez les premiers...
Après de houleuses discussions, la Chambre des Lords britanniques a approuvé la loi autorisant le clonage d’embryons humains à des fins thérapeutiques.
"Le gouvernement est prêt à légitimer n’importe quoi !" ; "Comment peut-on jouer à Dieu ?" ; "Où se situe la moralité de ceux qui considèrent l’embryon humain comme un accessoire qu’on créé, qu’on échange, qu’on congèle et qu’on détruit ?" Lors de la séance consacrée à la loi autorisant le clonage humain à des fins thérapeutiques dans la nuit du 22 janvier dernier, certains Lords britanniques ont remisé leur célèbre flegme...
Le recyclage des embryons
Approuvée par la Chambre des Lords après 7 heures de débats, cette extension d’une loi votée en 1990 autorisera bientôt les scientifiques britanniques à clôner des embryons humains pour lutter contre plusieurs maladies, dont celles d’Alzheimer et de Parkinson. Elle leur permettra également de prélever des cellules sur des embryons conçus dans le cadre de lutte contre la stérilité, puis abandonnés, à condition que leur âge ne dépasse pas 14 jours. Ce type de recherche pourra débuter dès le 31 janvier prochain, date d’entrée en vigueur de cette loi. Les cellules souches prélevées sur les embryons seront notamment utilisées dans le cadre de remplacement de tissus, puis, à plus long terme, d’organes défectueux. C’est en tout cas ce qu’espèrent les chercheurs qui, pour l’instant, ne maîtrisent pas encore toutes les possibilités et toutes les conséquences de ces techniques. "La recherche sur des cellules souches prélevées sur des embryons déjà conçus, secondairement abandonnés et dont la loi prévoit la destruction, n’entraîne pas de problèmes éthiques majeurs si les recherches autorisées permettent de sauver des vies humaines", déclare Jacques Montagut, médecin biologiste spécialiste de la reproduction, auteur du livre Concevoir l’embryon à travers les pratiques, les lois et les frontières (1). "En revanche, autoriser le clonage d’embryons pour y prélever des cellules souches dont on ne sait pratiquement rien me semble moins justifié. Les Anglais vont bien vite en besogne...", ajoute-il.
Une loi examinée... une fois votée
La décision des Lords britanniques a d’ailleurs soulevé de nombreuses contestations chez les sujets de Sa Gracieuse Majesté. Des représentants des cultes catholique, juif et musulman ont en effet adressé une lettre ouverte aux représentants de la Chambre des Lords avant le vote. Objet de la missive : ils demandaient un examen précis de la loi par un comité d’expert avant son passage devant les Lords. À la suite de cette lettre, Lord Alton, farouche opposant au clonage humain, avait déposé un amendement auprès des ministres britanniques afin de procéder à cet examen. Mais les ministres ont rejeté sa demande, sous prétexte qu’une telle mesure conduirait à faire reculer le vote de plusieurs mois, et donc à repousser le début des recherches. Ils ont toutefois accepté la constitution d’un comité qui examinera les termes de la loi... une fois celle-ci votée. De son côté, la Bioindustry Association, un groupe de pression britannique auquel adhèrent plusieurs centaines d’entreprises et d’universités (spécialisées dans les biotechnologies... ou pas : Ernst & Jung et Arthur Andersen font notamment partie des membres), attendait cette loi avec impatience. Aujourd’hui, la BIA applaudit des deux mains : dans un communiqué publié sur le bulletin de l’association, son président fait part de sa joie suite à la décision des Lords britanniques. Conciliant, il indique aussi qu’il se tient prêt à participer à un débat sur l’aspect éthique et les applications de ces nouvelles technologies.
Communiqué de la Bioindustry Association:
http://www.bioindustry.org/whatsnew...