Pour éviter la circulation de copies pirates de films ou de morceaux de musique entre ordinateurs, quatre géants de l’informatique, dont IBM et Intel, ont mis au point une technique qui semble aussi imparable qu’inapplicable.
À entendre les géants de l’industrie de la musique et du cinéma dénigrer les possibilités d’échanges de fichiers entre internautes, on se doutait bien qu’ils mijotaient un nouveau système capable d’éradiquer le flot incessant de copies illégales de CD ou de DVD. Mais ce qu’on ignorait, c’est que cette technologie ne viendrait ni des grands noms de la musique ou du film, ni des éditeurs de logiciels, ni des fabricants de support numériques, mais des constructeurs d’ordinateurs eux-mêmes ! IBM, Intel, Matsushita et Toshiba ont en effet annoncé, le 18 décembre dernier, la mise au point d’un système de protection des données pré-installé sur les PC ! Ce système, le CPRM (Copyright Protection for Recordable Media), limiterait la copie et la lecture des données numériques enregistrées depuis différents supports, dont les DVD et les mémoires Flash.
Des données cryptées sur tous les PC
La technique du CPRM consiste à insérer dans la mémoire non réinscriptible des disques durs un numéro d’identification propre à chaque ordinateur. Grâce à ce numéro, les données enregistrées depuis une source extérieure protégée par copyright (un CD par exemple) sont automatiquement codées de sorte que le fichier ne sera ensuite lisible que sur cet ordinateur. De plus, selon un procédé encore assez flou, ces fichiers ne pourraient être copiés qu’une seule fois. Conséquence : avec le CPRM, les vendeurs en ligne de musique ou de films qui le désirent pourront crypter leurs données en fonction du numéro d’identification de l’utilisateur. Fini les sauvegardes des meilleurs extraits de films sur CD. Terminé les échanges de tubes en MP3 entre les différents PC d’un même foyer. Et bien, sûr, pas question de lire les fichiers enregistrés avec l’ancien ordinateur sur une nouvelle machine... Après avoir annoncé la version finalisée de leur projet, IBM, Intel, Matsushita et Toshiba doivent se réunir à nouveau en février 2001 pour discuter de sa mise en application. Si tout se passe bien, le CPRM sera intégré dans les ordinateurs IBM commercialisés à partir de juin 2001. Si tout se passe bien... Car si l’industrie du film et de la musique applaudit des deux mains, les critiques de la part des constructeurs, des éditeurs de logiciels et des médias se multiplient.
Une vague de protestations
Premier mécontent : Microsoft. Ce dernier voit d’un mauvais œil l’apparition d’un nouveau standard sur des disques durs spécifiques qui entrave la "libre circulation des fichiers". De leur côté, les adeptes du logiciel libre font aussi la grimace. Impossible d’imaginer un accord entre les partisans de GNU/Linux et les créateurs d’un système aussi restrictif. ...videmment, à la suite des articles sur le sujet qui paraissent chaque jour, medias et consommateurs inquiets commencent à s’interroger sur ce système pour le moins surprenant. John Gilmore, un ancien membre de la direction de Sun, adepte des logiciels libres et spécialiste de la cryptographie, s’est d’ailleurs fendu d’un mail vindicatif à l’encontre du CPRM, publié sur le journal britannique The Register. Dans son message, il s’indigne contre cette atteinte à la liberté individuelle. Il invite les consommateurs à boycotter les produits IBM, Intel et Sony, et leur recommande d’utiliser leur argent chez des revendeurs qui leur proposent des produits qu’ils contrôleront eux-mêmes.
Le site 4C entity, qui détient le brevet du CPRM:
http://www.dvdcca.org/4centity
The Register:
http://www.theregister.co.uk
La réaction indignée de Joystick:
http://www.joystick.fr/news/fiche_n...