Un agriculteur canadien est accusé par Monsanto, l’un des grands spécialistes mondiaux des OGM, d’avoir acheté et cultivé de manière illégale des graines de canola génétiquement modifiées.
Percy Schmeiser ressemble à tous les braves fermiers qu’on croise dans les films ou dans les livres pour enfants. Sa spécialité : les graines de canola, une plante destinée à la fabrication d’huile. On l’imagine soignant chaque plant avec amour, surveillant régulièrement leur état pour limiter les dégâts provoqués par la pluie, la sécheresse ou l’invasion d’insectes nuisibles. Car Percy Schmeiser est de la vieille école. Contrairement à la majorité des spécialistes canadiens du canola, qui utilisent les produits génétiquement modifiés de la société Monsanto, Percy Schmeiser produit ses propres graines. À chaque récolte, il trie les plants les plus résistants, les mélangeant parfois à de nouvelles variétés pour obtenir les meilleurs graines. Effectuées pendant près de 50 ans, ces manipulations lui ont permis d’obtenir des graines de bonne qualité, résistantes à de nombreuses maladies.
Des plantes curieusement ultra-résistantes
Les ennuis de Percy débutent en 1997, lorsqu’il s’aperçoit que, malgré l’insecticide qu’il a pulvérisé dans des fossés et autour de plusieurs pylônes, des plantes de canola continuent de pousser. Il décide alors de consacrer une bande de terre à la culture de ces plantes curieusement ultra-résistantes. Convaincu de leur robustesse, il les cultive sur environ 1 000 acres de terre en 1998. Il affirme ignorer alors l’existence des graines transgéniques. Mais lors de la récolte, il s’aperçoit que la taille de ses plantations est anormalement peu élevée. Un phénomène qu’il attribue aujourd’hui à la contamination de ses champs par les plantes génétiquement modifiées de Monsanto. Le spécialiste mondial des graines transgéniques intente alors un procès à Percy Schmeiser, lui reprochant de s’être procuré et d’avoir planté ces graines de façon illégale. Outre 300 000 dollars de dommage et intérêt, la firme demande que l’agriculteur lui verse les revenus générés par les récoltes provenant de ses graines. De son côté, Percy Schmeiser affirme que ces plantes ont poussé sur ses terres suite à la pollinisation d’un champ voisin ou après la chute de graines d’un camion Monsanto. Il prétend aussi que malgré la destruction en masse d’une partie de ses graines, il a dû détruire 20 % de sa récolte de l’année 2000.
Le héros anti-OGM contre-attaque
Lors du procès, qui a duré 3 semaines cet été, des scientifiques appelés à témoigner pour Monsanto ont prouvé que la culture de ces graines ne pouvait être imputée à la pollinisation. Et Monsanto affirme qu’aucun camion de l’entreprise n’est passé devant les champs de Percy en 1996. Aujourd’hui, l’agriculteur attend le verdict du juge. Il vient à son tour de déposer une plainte contre Monsanto, qu’il accuse d’avoir endommagé l’équilibre écologique de sa ferme.
D’après le Mojo Wire, qui relate cette histoire dans sa dernière édition, Monsanto aurait relevé entre 100 et 525 cas similaires. Mais seul le cas de Percy est allé jusqu’au procès. Suite à cette histoire incroyable, il est devenu l’un des héros des petits agriculteurs canadiens et des militants anti-OGM du monde entier. Maigre consolation. "Je ne regrette pas d’avoir livré bataille, a-t-il confié au Mojo Wire, mais j’aurais préféré aller pêcher avec mes petits-enfants."