La ministre de la Justice, Marilyse Lebranchu, a annoncé jeudi 16 novembre l’intention du gouvernement de repréciser la responsabilité des hébergeurs de sites web.
Cybercriminalité
et prescription |
Au cours de son intervention au colloque de la LICRA, Marilyse Lebranchu
a donné sa position sur deux autres points :
La prescription sur Internet : sans commenter la décision
de la cour d’appel de Paris qui considère la publication sur Internet
comme permanente (Lire Le
FN s’attaque aux archives en ligne ), la ministre fait valoir que la
"question des revues de presse en ligne reprenant des articles de
la presse papier" pourrait faire l’objet d’une adaptation. Une
réponse étonnamment réductrice au problème posé
par la loi de 1881 sur la presse : la presse en ligne, qui est dans la ligne
de mire des tribunaux, nest pas seulement productrice de revues de
presse, mais aussi darticles propres qui, même archivés,
font aujourdhui lobjet de poursuites.
Le projet de traité sur la cybercriminalité du conseil
de l’Europe :
le texte est en cours de révision (lire Le
traité anti-cybercriminalité serait-il hors la loi ? ).
La Garde des Sceaux a remarqué qu’il ne comportait pas jusqu’à
présent "de dispositions sur les infractions racistes ou
antisémites commises par Internet" et précisé
que la France "n’accepte pas cette orientation". Traduction
: le gouvernement entend faire pression sur ses partenaires européens
pour introduire ces dispositions dans le texte. |
On pensait en avoir fini avec le débat sur la responsabilité des hébergeurs de sites et des fournisseurs d’accès à Internet. Une question abordée par le fameux amendement à la loi sur la liberté de communication, déposé par le député (PS) Patrick Bloche. Maintes fois trituré, finalement adopté par l’Assemblée Nationale puis censuré en partie par le Conseil Constitutionnel, le texte était entré en vigueur le 1er août dernier (lire
Les hébergeurs ne feront pas le boulot des juges). Mais la partie n’est pas terminée, à en juger par le discours prononcé par Marilyse Lebranchu à l’occasion d’un colloque organisé par la Ligue contre le racisme et l’antisémitisme (LICRA) dans les locaux de l’Assemblée.
Responsabilité civile
Pour la Garde des Sceaux, la loi adoptée le 1er août est "une première approche" en matière de responsabilité des hébergeurs. Conséquence : "Le gouvernement envisage la possibilité de rétablir la partie censurée [de l’amendement Bloche] en matière de responsabilité civile étant entendu que la censure du Conseil constitutionnel n’a été fondée que sur un raisonnement propre au droit pénal." Autrement dit, les hébergeurs devront prêter attention aux plaintes qui leur seront éventuellement adressées. Sinon, ils encourront des poursuites civiles pouvant se traduire, entre autres, par des dommages et intérêts à verser aux plaignants. Bref, il s’agit bien d’une réintroduction du principe de "diligence appropriée" (lire La définition du terme) tant décrié lors des débats parlementaires. Notamment pour sa faculté à inciter les hébergeurs à couper l’accès aux sites, afin d’éviter les problèmes légaux. Anticipant les critiques, Marilyse Lebranchu a reconnu d’ores et déjà que "la tâche n’allait pas être simple".
Des "diligences" européennes
Comme Patrick Bloche en son temps, la ministre a justifié l’introduction de cette notion par la nécessité de rendre la loi française conforme aux dispositions de la directive communautaire sur le commerce électronique. Adoptée en mars dernier, celle-ci laisse les hébergeurs libres d’apprécier s’ils doivent alerter la Justice ou prendre eux-mêmes des mesures de rétorsion à l’encontre de sites qu’ils hébergent, si leur contenu était illicite. Le gouvernement français précisera la teneur exacte de ces mesures dans la loi globale sur la société de l’information qu’il a promis de présenter début 2001 au Parlement.
Le discours de la ministre de la Justice:
http://www.justice.gouv.fr/discours...