Le ministère du Commerce américain soutient un plan de défense de la confidentialité des données en ligne, concocté par... les publicitaires eux-mêmes. Forcément, le texte n’est pas très sévère.
Au départ, une surprise : on apprend que le ministère du Commerce américain (FTC) a négocié avec le puissant lobby publicitaire, la Network Advertising Initiative (NAI), un projet de protection des données personnelles des internautes (lire Les annonceurs interdits de pistage ?). À l’issue de pourparlers secrets, la NAI, qui compte des géants comme DoubleClick ou AdKnowledge, semble avoir rendu les armes et s’engage à adopter une politique transparente en matière de confidentialité des données. On annonce en grande pompe que les internautes auront le droit de connaître les informations collectées sur eux, ce que les sites comptent en faire... Et surtout ils auront la possibilité de refuser que soient combinées les données anonymes (principalement glanées par les cookies, ces mouchards qui traquent les surfs des internautes à leur insu) et les données nominatives. Un geste politique courageux de la part de l’administration Clinton, surtout à quelques mois des élections.
Très "raisonnable"
Et puis, les choses se sont éclaircies. Le plan approuvé par la FTC, qui entre en application immédiatement, a été tout bonnement concocté par les publicitaires eux-mêmes ! Il repose sur un principe très américain : l’autorégulation. Les annonceurs, en grands garçons, s’engagent à respecter une charte de bonne conduite de leur cru. Forcément, le texte ne brille pas par son extrême sévérité. Il est demandé aux publicitaires de faire des "efforts raisonnables" pour protéger les données collectées et de donner aux internautes un "accès raisonnable" aux informations susdites. Ne doutons pas : les annonceurs, dont le travail ne pourrait pas exister sans la collecte d’informations clients, seront très "raisonnables" quand il s’agira d’appliquer le plan. Et on les comprend : le plan ne prévoit pas de donner à la justice une possibilité de sanction en cas de dérapage des publicitaires.
Un modèle pour les autres
"Ce texte a été écrit par des industriels pour des industriels", rugit Marc Rotenberg, le président d’Epic, un groupe pour la protection des données, interviewé par le quotidien CNet. Il ne croit pas si bien dire : la FTC insiste pour ce plan d’autorégulation serve de modèle à toute l’industrie du Web. Les défenseurs de la confidentialité en ligne ont encore de beaux jours devant eux, le combat n’est pas fini.