Les cybercâblés mécontents se sont livrés hier soir à une manifestation virtuelle dans la cité d’Archinet. Si la fréquentation a été honorable, une question se pose a posteriori : "À quoi bon crier dans le cyberespace ?"
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Mercredi 31 janvier, 21 heures. Les serveurs d’Archinet frôlent la surchauffe : c’est dans cet univers 100 % imaginaire que Luccas, l’association des mécontents des services de l’ex-Cybercâble devenu Noos, a choisi d’implanter sa première manifestation virtuelle. Les frustrés du haut débit sont au rendez-vous, dissimulés derrières des avatars aux slogans vengeurs. But du jeu : rallier en groupe cinq bannières dénombrant les revendications de Luccas : "
Noos, rend nous nos octets", "
Non aux compteurs d’octets", et d’autres formules pointant les doléances des cybercâblés. Les deux serveurs peuvent héberger à eux deux 70 personnes simultanément. Cryo, qui édite le logiciel "Scol" nécessaire pour visualiser l’univers 3D, s’était ému du cas des manifestants et avait proposé d’accorder une licence gratuite à Archinet, en vue d’accueillir plus de monde sur chaque serveur. "
On n’a rien vu venir", déplore Bertrand Penn, de Luccas. Qu’importe : la manifestation a tout de même eu lieu. Entre une soucoupe volante conduite par un Martien anti-Noos et quelques avatars du plus bel effet, la discussion commence. L’accès complexe à l’univers en 3D est quelque peu délaissé au profit de la discussion sur IRC où 140 personnes braillent des slogans rigolards. "
Quel Noos m’a piqué ?", se demande l’un d’entre eux, "
Vade retro, Satanoos !", clame un second, "
RENDEZ NOOS NOS OCTETS !", hurle un troisième.
Dispersion dans le calme
Au milieu des manifestants, des éléments soupçonnés d’être infiltrés par Noos, font leur entrée dans l’arène. Un dénommé "Noos lover" avoue au grand jour son amour pour l’opérateur du câble. Et se fait rabrouer sans tendresse par les internautes mécontents qui évoquent la lenteur de leur débit et la faiblesse de leur ping. Dans ce brouhaha incessant, les organisateurs ont bien du mal à promener les avatars de bannière en bannière. "Essayer de faire bouger 100 personnes dans un monde virtuel, c’est un coup à vous mettre les nerfs en boules", peste Bertrand Penn. Néanmoins, la manif tiendra bon jusqu’à 23 heures, heure à laquelle les gérants d’Archinet convient tout le monde à un paint ball virtuel. Fin des hostilités, dispersion dans le calme des manifestants. Les statistiques ? "Il y a eu 2 500 personnes sur Archinet pendant la journée", selon Bertrand Penn. Un chiffre que la police, pour une fois, ne démentira pas. La manif est-elle un succès ? Mitigé, pour le moins. Hormis la couverture médiatique de l’événement, on voit mal comment la réunion virtuelle de quelques avatars en colère pourrait faire trembler sur ses bases les géants de la Lyonnaise. À moins que les Noosiens mécontents n’obtiennent un jour l’autorisation préfectorale de bloquer physiquement les voies d’accès au provider, sous couvert du droit à manifester.