Intel vient d’annoncer la mise au point du plus rapide et du plus petit transistor jamais conçu. Grâce à lui, des processeurs embarquant un milliard de transistors et tournant à 20 gigahertz devraient voir le jour en 2007.
Révolutionnaire. Il n’y a pas d’autre mot pour qualifier le nouveau transistor conçu par Intel et annoncé lors du Silicon Nanoelectronics Workshop de Kyoto, une conférence sur les semi-conducteurs. Il y a tout d’abord sa taille : 0,02 micron, c’est-à-dire 500 fois plus fin qu’un cheveu. Pour avoir une idée du cap franchi, il faut savoir que les transistors utilisés aujourd’hui dans les Pentium 4 (P4), mesurent 0,18 microns, soit 9 fois plus. La largeur du "silicon dioxide gate", un des composants du nouveau transistor, équivaut à celle de 3 atomes ! Avec des composants de cette taille, il serait possible de loger dans un processeur 1 milliard de transistors alors qu’un P4 n’en contient aujourd’hui que 42 millions ! La consommation des futures puces devrait, elle, diminuer : 1 volt contre 1,7 volt pour les actuels P4. Mais ce transistor marque surtout une avancée probante dans la course à la puissance. Intel prétend que son dernier né est le plus rapide jamais conçu, et qu’il commute près de 1 000 fois plus vite que les transistors actuels. Et comme l’ouverture et la fermeture (la commutation) des transistors est à la base de tous les calculs qu’effectue un processeur, ce gain de vitesse devrait donc rejaillir sur les futurs modèles du géant américain. Mais si elle laisse entrevoir le cap des 20 gigahertz, l’intégration de ce transistor dans les processeurs grand public n’est pas attendue avant 2007.
Des jeux vidéo plus beaux
Mais à quoi bon une telle puissance ? Chez Intel, on évoque encore et toujours la vidéo, la reconnaissance vocale et celle de l’écriture manuscrite, mais aussi la réalité virtuelle. "Aujourd’hui, dans un jeu de foot par exemple, on ne peut imaginer de gérer l’animation de 45 000 spectateurs de façon individuelle car cela demande beaucoup trop de puissance. Une puce tournant à 20 gigahertz pourra assumer ce calcul, mais aussi faire tourner de nombreuses applications en même temps explique Jean-Paul Colin, directeur du développement chez Intel. Pour ce qui est de la reconnaissance vocale, passer de 98 % de reconnaissance à 99,8 % demande proportionnellement beaucoup plus de puissance que ce que les chiffres laissent croire." Selon lui, il ne faut pas s’emporter face aux chiffres étonnants qui accompagnent cette annonce. "Une formule 1 a un moteur de 900 chevaux, 10 fois plus que votre voiture, et pourtant elle ne va pas 10 fois plus vite. C’est un peu pareil pour les processeurs, il ne faut pas s’arrêter aux chiffres."
La loi de Moore en prend un coup
Cette découverte met à mal la loi de Moore. En 1965, Gordon Moore, le cofondateur d’Intel, avait déclaré que le nombre de transistors sur une pièce de silicium doublerait tous les deux ans. Depuis cette annonce, rien n’avait démenti la prédiction, devenue la loi de Moore. Jusqu’au transistor d’Intel, qui marque la limite de la fameuse loi. "Vous ne pouvez pas réellement descendre en dessous d’une largeur de 3 atomes", explique Gerald Marcyk, directeur de la recherche composants chez Intel, dans les colonnes de Cnet en faisant référence aux deux atomes d’oxygène et à l’atome de silice qui composent le "silicon dioxide gate".
Mais avant 2007, beaucoup de travail reste à accomplir. "Ce transistor constitue une base de travail pour les futurs processeurs. Mais organiser un milliard de transistors entre eux sur une puce, aucun logiciel n’en est encore capable ! Il va donc falloir le développer. De même, du point de vue technique, nous n’avons pas encore les outils pour produire en masse. Cela coûte cher, et prend du temps à construire", conclut Jean-Paul Colin, d’Intel.