Lassés d’attendre en vain une greffe, de plus en plus d’occidentaux se rendent en Chine pour y être transplantés. La plupart de ces organes proviennent de condamnés à mort.
On le sait, les délais avant de se faire transplanter un organe sont souvent désespérément longs. C’est la raison pour laquelle de plus en plus d’Occidentaux se rendent en Chine pour recevoir une greffe d’un organe prélevé sur un condamné à mort. Aux ...tats-Unis, les médecins confrontés à ce problème se demandent comment réagir. En fermant les yeux et en soignant leurs patients revenus de Chine, ils encouragent tacitement les voyages de ce type. En même temps, ils peuvent difficilement condamner des personnes qui tentent de sauver leur vie... Du côté des associations de transplantation, la position est plus claire : la plupart refusent ces pratiques comme le rappelle François Rault, secrétaire général administratif de France ADOT (fédération des Associations pour le Don d’Organes et de Tissus humains) : "Le don doit être volontaire, et autant que je sache, dans le cas de condamnés à mort chinois le don ne semble pas très volontaire." Beaucoup de ces associations s’opposent d’ailleurs à tout don d’organes provenant d’un prisonnier, dans la mesure où les conditions de l’incarcération ne donnent pas la certitude que le donneur est volontaire.
Mises à mort
Dans un article du New York Times paru le 11 novembre, les journalistes racontent comment des ressortissants occidentaux, et en particulier des Américains partent en Chine se faire greffer un rein, un foie, une cornée ou d’autres organes. Cette année, plus de 5 000 personnes ont été ou seront mises à mort. La plupart seront dépouillées de leurs organes. Si la majorité de ces organes revient aux citoyens chinois en attente de greffe, un nombre croissant d’Occidentaux en profitent, prêts à payer dix fois le tarif normalement pratiqué en Chine. À Shanghai, les cinq hôpitaux qui pratiquent la greffe des reins concèdent tous avoir déjà traité des patients étrangers. Une fois de retour, ces greffés rencontrent des problèmes pour se faire soigner. La situation des médecins occidentaux confrontés à ces patients revenant de Chine avec un rein tout neuf est en effet délicate. Le New York Times cite le cas du docteur Tomlanovich, un spécialiste de la greffe du rein à l’université de Californie. Plusieurs de ses patients se sont rendus à Shanghai ou à Guangzhou pour y recevoir un rein. S’il soupçonne que ces organes viennent de condamnés à mort, ses patients prétendent ignorer leur origine exacte. Le docteur Tomlanovich concède ne pas avoir bronché. Il précise pourtant : "Si un cas avéré se présente à moi, je suppose que j’expliquerais à ce patient qu’il m’est difficile de le traiter, et que j’essaierais de trouver une autre structure médicale pour l’accueillir." En clair, mieux vaut fermer les yeux que de savoir...
Problème de coordination
Mais, dans ses critiques, François Rault, de France ADOT, distingue donneur et receveur, surtout dans le cas de la Chine : " On ne peut pas condamner les personnes qui vendent leurs organes, on ne peut que condamner le système qui les a contraints à faire cela, explique-t-il. Je n’ai pas eu connaissance de Français s’étant rendu, ou souhaitant se rendre en Chine pour se faire transplanter. " Et puisque la demande crée l’offre, il en profite pour rappeler que la France manque cruellement de personnel pour assurer la détection et le maintien en mort encéphalique de donneurs potentiels. Il arrive donc que des organes ne soient pas prélevés pour une simple raison de manque de personnel spécialisé. " Je n’en veux pas pour autant aux politiques. En France, nous sommes en avance dans certains domaines de la transplantation, mais en retard sur d’autres. Ce n’est pas facile de répartir les budgets. En Espagne, c’est un peu le contraire. Ils ont de très bonnes structures de détection et de prélèvement, mais techniquement, ils sont un petit peu en retard. "