TRANSFERT S'ARRETE
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Une prison d’Arizona diffuse en direct sur le Net les premiers pas des détenus dans l’univers carcéral. Une initiative du shérif Joe Arpaio, qui fait la joie des internautes voyeurs et le malheur des suspects.
"Attention, ceci est une retransmission réelle de la prison de Maricopa. Certains détenus peuvent avoir des comportements violents ou sexuellement inappropriés. Les personnes identifiées sont des employés de cette prison, des policiers du comté ou des détenus. Selon la Constitution américaine, chacun est présumé innocent tant que sa culpabilité n’est pas prouvée." Bienvenue à Maricopa, Arizona, le quatrième centre carcéral des ...tats-Unis et la première prison au monde à installer des webcams dans ses couloirs. Depuis le 24 juillet dernier, quatre caméras permettent de suivre, 24 heures sur 24, l’arrivée d’un détenu, avec le rituel des empreintes et de la photo, la fouille et l’entrée en cellule. C’est le shérif Joe Arpaio, directeur de la prison, qui est à l’origine de cette opération. "J’ai fait mettre des caméras pour montrer au monde entier, et spécialement aux plus jeunes, que la prison n’est pas un endroit cool", explique très simplement celui que la presse américaine a surnommé "le shérif le plus dur d’Amérique". ...lu en 1992, réélu triomphalement en 1996, Joe Arpaio n’en est pas à son coup d’essai. Il s’est déjà fait remarqué en 1996 en remettant au goût du jour les "gangs des chaînes" (détenus enchaînés chargés de nettoyer les bords des autoroutes). Il a aussi changé les tenues des prisonniers, en les affublant d’uniformes roses...
Humiliation gratuite
Les webcams ont connu un succès d’audience dès les premiers jours. "Nous avons reçu près de 10 millions de visites en moins d’une semaine sur notre site", poursuit le shérif. "Mais notre serveur a lâché peu de temps après. Nous avons alors passé un accord avec le site crime.com, qui nous héberge maintenant et on tourne autour des 3 millions de hits par jour." Tous les employés de la prison savent qu’ils sont filmés et ont donné leur accord. Quant aux détenus, ils sont la plupart du temps mis devant le fait accompli, ce qui ne semble pas perturber Joe Arpaio. Pour Eleanor Eisenberg, directrice de l’association American Civil Liberties Union, il s’agit d’une profonde atteinte à la vie privée : "Le shérif oublie que la plupart des personnes filmées n’ont pas encore été jugées. Elles sont donc juridiquement innocentes. Il les humilie gratuitement." Une vingtaine de plaintes ont déjà été déposées par ces détenus. Mais il en faut plus pour arrêter le shérif, apôtre de la tolérance zéro contre le crime. "Plusieurs organisations sont en désaccord avec moi. Mais la télé montre bien des images d’arrestations, pourquoi ne pourrions-nous pas voir l’arrivée en prison ?", se contente-t-il de répondre. Joe Arpaio estime jouer la transparence. Peut-être pour redorer l’image de Maricopa : en 1996, un détenu de sa prison était retrouvé mort dans l’un des couloirs doté aujourd’hui d’une webcam. "Je veux juste montrer que mes hommes sont des professionnels et que leur travail est loin d’être évident." En Arizona, la webcam ignore visiblement la notion de dignité humaine.