Résumé de l’affaire Kevin Mitnick, le plus célèbre des pirates informatiques.
Il
y a quatre ans, Kevin Mitnick était arrêté
en grande pompe, après deux mois d’une
chasse à l’homme, organisée par
le FBI avec l’aide de Tsutomu Shimomura, un expert
en sécurité informatique du San Diego
Supercomputer Center. Kevin Mitnick était soupçonné,
entre autres, d’avoir pénétré
l’ordinateur de Shimomura, comme d’avoir
volé des dizaines de milliers de numéros
de cartes de crédit, copié des centaines
de programmes (directement piqués, le plus
souvent, dans les ordinateurs centraux des fabricants
de téléphone portable), ou violé
un nombre important de serveurs informatiques. Au
total, aujourd’hui, 25 chefs d’inculpation.
Si le juge avait refusé, les défenseurs
de Mitnick comptaient présenter la motion dont
nous vous mettons une copie ci-dessous. Cette motion
signale entre autre que quand Shimomura est entré
dans l’appartement de Mitnick,il était un citoyen
comme les autres, agissant illégalement en
tant qu’agent du gouvernement, et donc absolument
pas autorisé à fouiller ce lieu privé.
Si le juge accepte cette argumentation, que l’on sentait
déjà poindre dans le livre de Jonathan
Littman sur l’affaire Mitnick, la fouille entière
serait illégale, et une bonne partie, voire
la totalité, des pièces saisies à
cette occasion ne pourrait être retenues.
La motion en anglais :
http://www.kevinmitnick.com/040599ncecpamotion.html
Le problème paraît simple, mais il
ne l’est pas.
D’abord parce que l’arrestation elle-même
de Mitnick pose problème : deux civils, Shimomura
et John Markoff, journaliste au New York Times,
ont été présents tout au long
de l’histoire, et Shimomura a même, a plusieurs
reprises, commandé l’opération.
Ce qui est légalement contestable, vu qu’ils
ne sont, ni l’un ni l’autre, officiers de
police. Ensuite, une enquête du journaliste
Jonathan Littman a montré, il y a deux ans,
que Mitnick n’avait jamais pénétré
dans l’ordinateur de Shimomura… L’homme
qui avait violé la sécurité de
l’expert japonais était un cracker israélien,
que l’arrogance de Shimomura avait particulièrement
agacé. Cela paraît n’être
qu’un détail mais il a son importance
: toute l’histoire de l’arrestation de Mitnick,
magnifiquement médiatisée dans la presse
mondiale, jouait de ce duel entre le pirate et le
piraté. Et c’était totalement faux.
Aujourd’hui, il ne reste plus aucune mention
de Shimomura dans les chefs d’accusation contre
Mitnick…
Ensuite, le plus célèbre des pirates
informatiques a eu droit à un traitement particulier
en prison : pris d’une totale paranoïa,
ses gardiens l’ont régulièrement
envoyé au trou dès qu’il utilisait
le moindre instrument électronique, persuadé
qu’il avait les moyens de transformer un walkman
en émetteur radio… Pendant plus de trois
ans, Mitnick n’a même pas eu le droit à
un ordinateur pour travailler à sa défense,
alors que TOUTES les pièces de l’accusation
sont des fichiers informatiques ! Il vient seulement,
il y a quelques mois, d’être autorisé
à disposer d’un ordinateur. Mais celui-ci
lui a été confisqué récemment,
pendant plus d’un mois, pour " inspection
". Et certains documents auraient, selon lui,
disparu…
Le procès qui va s’ouvrir sera certainement
passionnant. Car la personnalité de Kevin Mitnick
n’est pas ordinaire : s’il a effectivement
dupliqué des programmes, abusé de serveurs
téléphoniques, et volé des numéros
de carte de crédit, il n’a jamais utilisé
un seul de ces numéros et n’a jamais revendu
les logiciels. C’était " pour s’amuser
"… Déjà arrêté,
il avait juré de ne plus recommencer. Pour
les experts psychologues, il souffre d’une véritable
addiction. Il ne peut s’empêcher de pirater
tout ce qui passe.