Depuis quelques mois, un mystérieux site propose les "confessions d’un pickpocket". En fait, c’est un outil de promotion pour un long métrage qui sortira en juillet.
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Paris, métro Abesses. Haut-parleur :
"Des pickpockets sont susceptibles d’agir dans cette station". Le lieu du rendez-vous est bien choisi. L’homme que je dois rencontrer est l’auteur de pickpocknet.com. Travaillant sous le nom de Franck Spadone, il est spécialiste de la chourre, caméléon du métro parisien. Et, depuis trois mois, il distille ses conseils, livre ses confidences sur le Net : dans un cahier, quelques images prises à la volée, des textes sur son métier. On y rencontre ainsi "la bande des péruviens", spécialistes des palaces et des aéroports. Fin mai, des affiches sont même apparues sur des murs de Paris : visage flou,
"Avis de recherche, Franck Spadone, pickpocknet.com". Mais sur le site, le visage se précise. Il ressemble étrangement à l’acteur Stanislas Merhar...
10h30, l’heure du rendez-vous. Spadone est double : Richard Bean, réalisateur et Franck Depoux, associé à la promotion. Car pickpocknet.com est, en fait, un site monté à l’occasion un film, Franck Spadone, dont la sortie est programmée le 12 juillet.
Film expérimental
"C’est un film noir, explique Richard Bean. Il évoque la rencontre entre deux niveaux de criminalité. C’est l’histoire d’un pickpocket qui se frotte à des individus beaucoup plus dangereux que lui". Issu du théâtre, Richard Bean signe à 35 ans son premier film. "Le parti-pris cinématographique est assez radical", dit-il. Traduction : des plans très longs et seulement huit répliques pour le personnage principal. Franck Spadone a été présenté à la dernière Mostra de Venise. "Le film fonctionnant sur un mode très allusif, il a déconcerté, avance l’attaché de presse de la société productrice du film. Plusieurs journalistes français ont trouvé que c’était de la merde, et le public a réagi assez violemment, en bien et en mal", raconte le réalisateur.
Bref, un film difficile à distribuer, et pour lequel le producteur n’a peut-être pas voulu consacrer un budget de promotion à perte. "De toute façon, sauf exception, le producteur ne fait pas de bénéfices sur les entrées en salle", commente Richard Bean.
Teasing
Franck Depoux et Richard Bean© EP |
Avec son copain Franck Depoux, il a opté pour une stratégie de teasing sur le Web. Il a réuni les documents amassés pour l’écriture du scénario et a monté un site. Celui-ci, qui utilise très bien la technologie flash, tout en restant simple, retrace la vie du héros avant le film.
"Tout ce que je n’ai pas pu dire dans le film sur la mythologie du pickpocket, je l’ai publié en ligne". Lancé avec un seul chapitre et référencé dans les annuaires comme un récit autobiographique, le site s’est enrichi d’indices au fur et à mesure. Jusqu’à la bande-annonce, qui sera mise en ligne le 27 juin.
"On a tenté un nouveau type de campagne, vu qu’on n’avait pas de moyens", résume Franck Depoux. Dans l’esprit du "Projet Blair Witch", le film américain qui a marché grâce au Net ?
"La différence, c’est qu’au final, le personnage ne peut se comprendre totalement qu’avec les deux éléments", répond-il. Aveu d’impuissance ou réelle complémentarité ?
Les internautes pourront se faire leur idée en salle, mais ils devront se dépêcher : le film sera à l’affiche dans un seul cinéma parisien, pendant trois semaines et peut-être ensuite en province...
"Lors de la sortie en DVD, nous inclurons le site", précise Richard Bean. L’expérience l’a familiarisé avec l’image numérique et le support informatique. "Ca relativise mes désirs cinématographiques", avoue-t-il, attiré par le multimédia. Avec Franck Depoux, il a créé une société, Créafilms. "Ca serait bien de proposer d’autres récits illustrés sur internet", avance son associé. Un futur polar en ligne ?