Les illustrateurs sonores reconstituent, pour les journaux télévisés, la bande-son des reportages défectueux ou de mauvaise qualité. Travaillant sans filet, ils interviennent quotidiennement, en direct, dans les JT.
Le passage au numérique n’y a rien changé. Les illustrateurs sonores travaillent toujours en petits artisans du quotidien. Leur rôle : reconstituer la bande-son des reportages défectueux pour les journaux télévisés français. Lorsqu’ils le peuvent, ils interviennent plusieurs heures avant le début des JT mais, lorsque les sujets arrivent au dernier moment, ils sont contraints de travailler en direct.
Pour reconstituer la réalité, les illustrateurs disposent d’un matériel impressionnant : des discothèques de plus de 10 000 disques et des centaines de milliers d’effets sonores. Leurs ressources sont inépuisables car il est non seulement possible, mais surtout souhaitable, de mélanger les sons. Sans un léger bruit de vent, un fond de ronronnement de voitures et quelques bruits de pas, une scène de rue semble désespérément vide...
Gare au dérapage
Anodin le travail des illustrateurs ? Pas toujours... Ainsi le 3 décembre 1996. Une bombe vient d’exploser à Paris, à la station RER Port-Royal. Des flashs spéciaux sont immédiatement programmés mais les premiers reportages arrivent sans une miette de son. Dans la précipitation et à l’aide de quelques CD, les illustrateurs reconstruisent intégralement la scène : sirènes de pompiers et d’ambulances, bruits de vent et de rue, quelques cris estompés... Et le tour est joué ! De même pour l’attentat des Jeux olympiques d’Atlanta, ou encore l’enterrement d’Yitzhak Rabin (dont les images étaient encombrées d’un commentaire en hébreu)...
La responsabilité de ces artisans du son est immense. Installés en régie, derrière les ingénieurs, ils disposent de leurs propres manettes. Chaque soir, grâce à quelques CD préalablement calés, ils " pilotent " des hélicos, " tirent " au mortier, " hurlent " avec des manifestants ou " soufflent " dans les voiles du Vendée Globe Challenge... Gare au dérapage ! Une main qui hésite et c’est le gazouillis d’oiseaux sur des images dramatiques de Tchernobyl, des applaudissements sur une scène d’enterrement. L’analyse de l’image a beaucoup progressé. Celle du son reste à explorer.