Une start-up très tendance de la saison 1999-2000 et un analyste Internet très écouté de Wall-Street figurent en tête du classement eCompany des bides de la netéconomie. Des noms !
Ils sont tous les deux nés à Lund, en Suède, en 1970. Kajsa Leander et Ernst Malmsten ont lancé ensemble en 1999 la start-up Boo.com, sans doute la plus méchamment branchée de la netéconomie alors triomphante. Le plus gros bide également, comme chacun sait. Ce cliché risque d’ailleurs de leur coller longtemps à la peau : près d’un an après le naufrage de Boo, Kajsa et Ernst font encore parler d’eux. Cette fois-ci en décrochant la première place au classement des " épisodes les plus stupides de l’ère du e-Business ", établi par eCompany. Mieux, Boo occupe également la vingtième place (1) du classement au travers des investisseurs qui se risquèrent dans l’aventure : ceux de la première heure, le patron français Bernard Arnault, l’italien Luciano Benetton et la banque JP Morgan, ainsi que tous ceux qui, plus tard, investirent pas moins de 135 millions de dollars dans l’affaire. "La presse a beau jeu de nous reprocher d’avoir dépensé 135 millions de dollars en voyages en Concorde et bouteilles de Champagne, se justifiait Ernst Malmsten dans le New York Times, mais en fait nous ne buvons que de la vodka ".
Quand un blondinet régnait sur Wall Street
Plus banal et franchement moins drôle : des entreprises comme March First, Beyond et Buy.com, qui, chacune dans leur secteur, ont connu la gloire avant de licencier à tour de bras, se distinguent également aux toutes premières places du classement d’eCompany. Mais la palme revient très certainement à Henry Blodget. Le blondinet de 35 ans est entré au Panthéon des figures de la netéconomie. Jusqu’en 1998, cet analyste financier exerçait son métier dans une obscure maison, la CIBC World Markets. C’est là qu’il recommanda, en décembre 1998, l’action Amazon à l’achat. Son cours, prédit-il, doublerait en un an. En réalité le titre Amazon accomplit la performance annoncée... en moins de trois semaines. Coup de chance ou brio, Blodget fut propulsé sur le devant de la scène. Lui et son équipe furent débauchés quelques semaines plus tard par Merrill Lynch. L’année 2000 signa la consécration du petit blond, le magazine new-yorkais Institutional Investor le plaçant en tête de son classement des analystes Internet (une référence), devant l’égérie des marchés Mary Meeker (Morgan Stanley). Aujourd’hui le marché brûle les idoles d’hier. Les analystes financiers sont contestés et Henry Blodget n’échappe pas aux critiques. Il décroche à lui seul - excusez du peu - les sixième et dixième places du classement eCompany ( pour deux analyse distinctes). En ne résiste pas à rappeler, pour l’occasion, les propos qu’il tenait en 1999. "Contrairement à de célèbres bulles financières (...) la bulle Internet se forme sur des fondamentaux robustes, peut-être même les plus robustes que le marché n’ait jamais connu, prophétisait alors Henry Blodget. Derrière ces hausses de cours vertigineuses, on trouve en réalité les fondements d’entreprises qui pourraient ni plus ni moins constituer le moteur de la croissance du début du XXIe siècle (...) Ce n’est pas parce que l’évolution des cours des actions Internet fait penser à une bulle que cette bulle éclatera forcément ". Pas forcément, mais peut-être un peu quand même.
(1) Les péripéties de Boo valent à la start-down six apparitions dans le classement d’eCompany (1ere, 20e, 31e, 57e, 86e et 101e places).