Aujourd’hui s’ouvre le septième "Rassemblement international sur la bio-dévastation", organisé par les anti-OGM à Saint-Louis, dans le Missouri, la ville où se trouve le siège social du groupe Monsanto, numéro un mondial des semences transgéniques. Le forum s’achève le 18 mai, le jour où démarre le World Agricultural Forum, un sommet qui réunira les industriels du secteur.
Le logo du 7ème Rassemblement international sur la bio-dévastation (DR)
Plusieurs centaines de militants écologiques, agriculteurs et chercheurs de différents continents participeront à trois jours de conférences et de débats, mis au point par le parti des Verts de Saint-Louis et trois ONG.
Une fracture transgénique ?
Cette année, le rassemblement est axé sur le "racisme environnemental". Par ce néologisme, les militants américains désignent les inégalités raciales face à la pollution, en général. Par exemple, ils dénoncent le stockage ou l’émission de déchets chimiques toxiques dans des quartiers défavorisés ou dans des pays en développement, majoritairement peuplés de personnes "de couleur" pauvres.
"Nous pensons que ce concept s’applique aussi au secteur des biotechnologies, note Daniel Romano, l’un des organisateurs bénévoles. Car ce sont les personnes de couleurs défavorisées qui risquent le plus d’en souffrir. Les multinationales américaines cherchent à imposer leurs biotechnologies à des pays du tiers-monde, en Afrique, en Asie du Sud-Est et en Amérique du Sud. Et ces pays n’ont souvent pas les moyens de refuser."
La survie des petits exploitants agricoles du monde entier, face à l’emprise croissante des multinationales à travers aux OGM, sera l’un des grands thèmes du rassemblement de Saint-Louis.
Daniel Romano cite en exemple le cas du maïs transgénique, que les États-Unis ont proposé de donner à plusieurs pays d’Afrique australe dès l’été 2002, pour remédier à la famine. Dans les pays qui ont accepté, la population mange des aliments transgéniques dont les consommateurs européens sont pour l’instant protégés.
"Si les graines transgéniques contaminent les cultures locales de l’Afrique australe, poursuit l’organisateur du rassemblement, les multinationales demanderont-elles aux paysans africains de leur verser des redevances pour l’usage de leurs semences brevetées ? Ces paysans qui pratiquent une agriculture de subsistance n’auront pas les moyens d’acheter chaque année les semences transgéniques et les pesticides qui vont avec."
Contamination à distance
Le Canadien Percy Schmeiser, qui prendra la parole dès l’ouverture de la conférence, connaît bien le problème. Cet agriculteur septuagénaire a été accusé en 1998 par la multinationale Monsanto de cultiver illégalement une variété de colza transgénique.
Bien que ses champs aient très vraisemblablement été contaminés accidentellement par du pollen de cultures transgéniques, Percy Schmeiser a été condamné à verser 20 000 dollars canadiens d’amende (12 700 euros) à la multinationale. Il a fait appel devant la Cour suprême du Canada, qui a accepté le 8 mai dernier de se saisir de l’affaire et devrait rendre son verdict dans l’année à venir.
Parmi les nombreuses questions abordées dans le forum, celle de la contamination entre cultures sera particulièrement étudiée. Ignacio Chapela, microbiologiste réputé, de l’Université de Berkeley en Californie, exposera ses recherches, menées en 2001 dans le sud du Mexique. Ces travaux ont montré que des variétés locales de maïs de la province d’Oaxaca avaient été contaminées par des plants transgéniques, ce qui prouve que le pollen transgénique peut parcourir une grande distance. En effet, les rares cultures d’OGM autorisées au Mexique se trouvent à plus de 100 kilomètres d’Oaxaca.
Manifestation et marionnettes
Le rassemblement de Saint-Louis devrait se terminer dimanche par une manifestation anti-OGM devant le World Agricultural Forum, qui se tiendra dans le centre-ville de Saint-Louis, du 18 au 20 mai.
Ce Forum, qui se veut l’équivalent dans le secteur de l’agriculture du World Economic Forum de Davos, réunira des multinationales de l’agro-alimentaire et de la biotechnologie, des représentants de l’OMC et d’autres institutions internationales, ainsi que les ministres de l’agriculture de nombreux pays.
Les manifestations anti-OGM continueront après l’ouverture du World Agricultural Forum. Le 19 mai, un convoi d’une quarantaine de cyclistes quittera Saint-Louis pour parcourir 1600 kilomètres et diffuser en chemin des informations sur les OGM, à grand renfort de marionnettes et de spectacles de cirque ambulant. L’arrivée est prévue à Washington le 19 juin... juste à temps pour manifester contre le congrès annuel de la Biotechnology Industry Organization, un syndicat professionnel qui compte dans ses membres tous les poids lourds du transgénique.
Le site du Rassemblement international sur la bio-dévastation:
http://www.gatewaygreens.org/biodev7/
Le site du World Agricultural Forum:
http://www.worldagforum.org
Le site de la manifestation du 18 mai contre le World Agricultural Forum:
http://worldagforum.com/action/
Le site du Canadien Percy Schmeiser, en procès avec Monsanto:
http://www.percyschmeiser.com/