Le livre électronique était la vedette du salon du Livre 2001. Il s’est fait discret lors de l’édition 2002. Peu de stands, peu de produits, peu de battage.Mais toujours de l’avenir, assure à Transfert Jean-Pierre Arbon, le responsable en France de Gemstar, producteur (américain) du eBook. Arbon, ancien directeur général de Flammarion, est aussi le président-fondateur des éditions 00h00.com, pionnier de l’édition électronique. Entretien.
On a l’impression que le eBook se fait discret au Salon du Livre ?
C’est une année un peu creuse pour nous, par rapport aux éditions précédentes. Nous avons décidé de repousser le lancement du eBook en France, sans doute au début de l’année prochaine. Nous voulons attendre la nouvelle génération de machines, moins chère. Car c’est le principal problème, le principal frein. Aux Etats-Unis, les deux machines existantes sont proposées aujourd’hui aux environ de 280 et 650 dollars (environ 300 et 700 euros). C’est quand même assez dissuasif.
Vous pensez que, dans un an, les machines seront à quel prix ?
Il faut être lucide : ce ne sera pas encore un prix qui permettra d’en vendre comme des petits pains, mais environ 30%, de moins qu’aujourd’hui. Soit 200 euros pour le petit modèle.
Donc rien cette année ?
Cela ne pose pas de problème pour Gemstar, une entreprise qui parie assez facilement sur le long terme. Je suis allé les voir il y a un mois, à Pasadena (Californie), et ils ont approuvé cette stratégie d’attente. Comme tous les vents sont contraires aujourd’hui, la conjoncture est très défavorable, on s’est juste dit que ce n’était pas la peine de s’exposer. On attend d’avoir un produit permettant de mieux répondre au marché.
Les bibliothèques semblent pourtant des clients potentiels très intéressés ? Aux Etats-Unis, ils sont de gros acheteurs de livres électroniques.
C’est vrai, cela marche très bien dans les bibliothèques. Nous avons de nombreux contacts et faisons même des tests actuellement, depuis janvier, dans cinq villes de la région Rhône-Alpes (Lyon, Valence, Annecy, Grenoble et Bourg-en-Bresse), sur l’utilisation et les réactions des lecteurs. Cela répond à un besoin des bibliothèques qui doivent s’adapter à la future loi sur le prêt payant, qui ne leur permettra plus d’acheter des livres à moins de 10% du prix public. Or le livre électronique est et restera bien moins cher qu’un livre traditionnel. C’est donc une piste pour eux. Du coup, il se peut qu’il y ait un lancement du eBook en France, pour les bibliothèques, plusieurs mois avant le lancement grand public de début 2003
Début 2003, cela veut dire après Noël ?
Nous ne sommes pas encore sûrs de pouvoir, industriellement, disposer à temps des nouvelles machines pour la période des fêtes.
Combien de eBooks ont été vendus aux Etats-Unis
Environ 60 000. Dont 80% du petit modèle. Cela n’est pas rien, mais ce n’est pas encore un marché de masse.
Comment réagissent les éditeurs ?
Très bien. Nous avons des contrats avec plusieurs des principaux éditeurs, pour sortir les éditions électroniques en même temps que les éditions papier. Mais ils attendent, et c’est normal, que nous bougions, que nous sortions nos machines
Les libraires vous suivent-ils ?
On n’a pas encore beaucoup avancé, mais notre souhait est de leur permettre de vendre des éditions électroniques. Certains, les plus grosses librairies, pourront aussi vendre directement la machine. Mais cela pose des problèmes auxquels ils ne sont pas habitués : la garantie, la hot-line, le service après vente... Mais nous souhaitons beaucoup les associer à cette nouvelle forme d’édition.