Les premiers bandeaux publicitaires grand format ont fait leur apparition en France, la semaine passée. La morosité du marché de la publicité en ligne pourrait inciter de nombreux sites à les adopter.
Julien Chambaud |
Mauvaise nouvelle pour les internautes publiphobes, le nouveau format publicitaire semble faire fureur. Ce gros carré de 300 pixels sur 250 - l’un des formats publicitaires approuvés par l’International Advertisement Bureau - est apparu la semaine dernière sur le site de Sport4Fun. Et Infonie, l’annonceur français qui a lancé cette première campagne, se frotte les mains. En cinq jours, ce type de bannière a été cliqué en moyenne par 5,8 % des internautes qui l’ont vue. Un record, puisque le taux de clic pour les bannières publicitaires classiques se situe généralement entre 0,3 et 1 %. Sport4Fun a lui aussi certainement apprécié l’expérience : la bannière nouveau format est vendue à un coût pour mille (CPM) de 600 francs. C’est deux à trois fois plus cher que les meilleurs CPM pour une bannière classique. Doit-on en conclure que de gros carrés multicolores vont bourgeonner sur nos écrans d’ordinateur ? Pas sûr.
Mesurer le taux de clic n’est pas pertinent
En premier lieu, le taux de clic n’apparaît plus comme l’indicateur le plus pertinent pour mesurer l’efficacité d’une campagne. "Cela fait d’ailleurs des mois que nous l’expliquons, souligne Lionel Ségard, directeur général de 24/7 Media Europe. En fait, le taux de clic ne mesure que l’intérêt spontané de l’internaute et en aucun cas l’efficacité d’une campagne. Pour en mesurer l’impact, il fait prendre en compte la perception de la marque par l’internaute. La publicité sur Internet, c’est aussi de la mémorisation de message, et la notion de répétition est importante. Les bannières classiques ne vont donc pas disparaître."
Deuxième bémol, certains sites à fort contenu rédactionnel, ceux des journaux en ligne par exemple, se montreront probablement réticents à adopter ce format. "Je ne vous cache pas que, sur ce point, nous sommes dans l’expectative", confirme Pierre-Louis Fontaine, directeur du marketing de la régie publicitaire AdLink. "La vraie question n’est pas "est-ce que les sites auront le choix d’adopter ou non ce type de bannières ?", mais quels sites auront le choix, précise Lionel Ségard, le directeur général de 24/7 Media Europe. Les sites qui ont une audience qualifiée auront le choix car les annonceurs voudront de toute façon être présents chez eux." En revanche, les sites comme Hotmail, Multimania ou Caramail, à l’audience considérable, mais très peu qualifiée, n’auront probablement pas le choix. Certains d’entre eux, en effet, ne touchent déjà plus que 8 francs pour 1 000 pages affichées. Adopter des bandeaux publicitaires plus larges pour les vendre plus cher ne peut que les intéresser.
Argument de marketing ?
Vu sous cet angle, l’apparition de bandeaux publicitaires plus larges apparaît en fait symptomatique de la crise de la publicité en ligne. "Et c’est cette crise qui pousse à imaginer de nouveaux formats", souligne Pierre-Louis Fontaine. "Au-delà des nouveaux formats, on va donc sûrement voir de plus en plus de Flash et de vidéo dans les bannières", poursuit Lionel Ségard. "Pour autant, ces nouveaux formats ne suffiront probablement pas à réveiller le marché de la publicité en ligne", observe Cécile Corraïni, responsable de la communication internationale de Netcrawling. Les chiffres américains semblent le confirmer : outre-Atlantique, les grands formats ont été adoptés à l’automne dernier. Or, ils ne représentent aujourd’hui qu’1 % de l’ensemble des bannières, selon Jupiter Media Metrix. "Les nouveaux bandeaux, c’est avant tout un argument de marketing supplémentaire pour les sites qui veulent vendre leur espace, conclut Cécile Corraïni. Mais, bien plus que de nouveaux formats, les annonceurs attendent la mise en place d’outils de mesure fiables avant de se relancer sur le Net."