Depuis quelques jours, circule dans l’administration et dans quelques rédactions une lettre critiquant la politique du gouvernement en matière de régulation de l’Internet. Son auteur a pris le pseudonyme de Clisthène. Transfert publie le texte intégral.
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la lettre de Clisthène
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Vous êtes haut fonctionnaire, vengeur masqué, voix minoritaire d’un parti politique ou d’une administration, et vous n’êtes pas d’accord sur une réforme, une analyse officielle, un projet de loi. Votre timidité, votre devoir de réserve, vos espoirs de promotion vous interdisent de vous exprimer publiquement au sujet de tout ou partie de ce qui précède. Vos interlocuteurs habituels ont fait bon marché de votre puissance de réflexion personnelle ou collective. Alors, n’hésitez pas : prenez un pseudonyme ! C’est ce que vient de faire "Clisthène", nom de plume, autant qu’on puisse le savoir, d’un personnage du service public, auteur d’un texte circulant depuis le 19 février dans l’administration et dans certaines rédactions. L’objet de son ire : les premières informations circulant sur la nature du
Forum des droits de l’Internet, dont l’organisation a été confiée par le gouvernement à la conseillère d’...tat Isabelle Falque-Pierrotin. L’allusion du texte à une "
note officieuse de présentation du projet" désigne le pré-rapport rédigé par celle qui est chargée de mettre en place le Forum. Au mois de janvier dernier, un haut-fonctionnaire avait mis ou fait mettre en ligne, sur le site web du Conseil constitutionnel, un article, promptement retiré, mettant en cause l’Assemblée nationale. Le texte était signé "Solon". Pour mémoire (les plus motivés visiteront le rayon encyclopédies des bibliothèques), les Athéniens considéraient Solon comme le père fondateur de la démocratie et Clisthène comme son restaurateur après la période des tyrans. Le créateur, aussi, de l’ostracisme, procédure qui consistait à exclure de la cité pour dix ans ceux qui paraissaient aspirer à la tyrannie... Une pierre dans le jardin de Jospin, si l’on estime que dix années correspondent à deux quinquennats.