Les ministres européens se sont entendus sur le principe de l’opt-in appliqué aux communications électroniques dans le cadre de la directive sur les données personnelles.
Le Conseil des ministres européens a donné aujourd’hui son feu vert à la proposition de directive du Parlement européen sur "le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques". Les messages publicitaires non sollicités y sont interdits non seulement par fax et automates d’appel, mais en plus par e-mail. Il faut demander l’accord des internautes avant de leur envoyer des mails commerciaux.
Ainsi, les ministres européens n’ont pas suivi leur Parlement, qui souhaitait laisser la liberté aux Etats du régime de l’opt-in (consentement préalable) ou de l’opt-out (démarche volontaire pour se faire rayer d’une liste) pour le marketing par e-mail. L’assemblée européenne laissait ainsi la porte ouverte à une politique plus favorable au spam dans des pays comme la Grande-Bretagne, l’Irlande, le Luxembourg... et la France.
Pierret retourne sa veste
Bizarrement, la même France qui prépare une loi sur la société de l’information privilégiant l’opt-out se félicite de la décision du Conseil à travers la personne du secrétaire d’Etat à l’Industrie Christian Pierret : "Cette position répond aux préoccupations des consommateurs, tout en reconnaissant aux entreprises la capacité de poursuivre une relation avec leurs clients... C’est pourquoi la France a soutenu cette proposition qui sera examinée par le Parlement européen dans le cadre de la seconde lecture du projet de directive."
Bernard Siouffi, délégué général de la Fédération des Entreprises de Vente à Distance (FEVAD), n’est pas du même avis. Le coup de théâtre du Conseil "frise l’atteinte à la liberté de communiquer et à la liberté d’entreprendre". Il s’étend sur ses griefs : "Nous ne pourrons plus recruter de clients. Nous proposions pourtant une politique d’opt-out exigeante, dans le respect de l’esprit de la loi Informatique et Libertés de 1978 – quoiqu’en disent ceux qui pensent qu’il s’agit d’une politique d’ouverture. La société de l’information et le commerce électronique en Europe vont reculer".
Le représentant de la FEVAD regrette "une position d’interdiction qui amalgame des moyens de communication qui n’ont rien à voir", et qui traduit, selon lui, une "peur de la technologie" de la part de l’Europe. "L’e-mail marketing devrait pourtant être appelé à un développement important. Ce n’est pas uniquement un outil pour les grandes entreprises, mais aussi une solution pour les PME, car c’est un média facile d’accès et peu coûteux".
Mais Bernard Siouffi promet un bras de fer lors du vote de la loi sur la société de l’information en France, qui se trouve désormais en contradiction avec la directive européenne. Les industriels du marketing direct feront tout pour récupérer un peu de marge de manœuvre : "On fera valoir l’intérêt des professionnels tout en respectant la volonté des consommateurs. On demandera, par exemple, que les gens qui se sont positionnés pour obtenir de l’information puissent apparaître sur les mailings".
Limites de l’accord
Contrairement à ce représentant des vendeurs de données, le BEUC, Bureau européen des Unions de Consommateurs, se réjouit de l’accord obtenu au Conseil en faveur de l’opt-in. Toutefois, il pointe un "soft opt-in" : en effet, les entreprises qui auront obtenu directement du client ses coordonnées, à l’occasion d’un achat en ligne, pourront s’en servir pour leur propre prospection commerciale, sauf si le consommateur s’y oppose expressément. Heureusement, la revente à des tiers des données personnelles, source de nombreux énervements aujourd’hui, n’est pas autorisée sans consentement préalable.
Outre la question du spam, la directive aborde le problème de la durée de conservation des données de connexion, celui des cookies, puis des annuaires téléphoniques. Il semblerait que le Conseil n’ait pas repris l’avis du Parlement européen pour les deux derniers thèmes, en préférant la voie de l’opt-out à celle du consentement préalable. Quant à la conservation des logs Internet, les données de connexion, elle s’étend normalement à trois mois (pour les besoins de facturation du fournisseur d’accès), mais les Etats membres sont libres de prendre des mesures de conservation différentes afin de faciliter le travail des enquêteurs de police. Ces dispositions doivent cependant être "nécessaires" et "proportionnées". À l’heure où nous publions, le texte officiel n’était pas encore en ligne sur le site de l’Union européenne. Il devrait apporter des précisions supplémentaires.
Communiqué de Christian Perret
http://www.industrie.gouv.fr/accueil.htm
Fédération de la Vente à Distance
http://www.fevad.com