Le tribunal de Paris demande des précisions à l’association anti-raciste en procès avec 13 fournisseurs d’accès et estime nécessaire "d’approfondir le débat".
Tout le monde est content. Les fournisseurs d’accès attaqués, les associations anti-racistes et le juge lui-même. Autant dire que le point de vue de chacune des parties a été préservé dans la décision rendue jeudi 12 juillet par Jean-Jacques Gomez. Le juge des référés du tribunal de Paris devait apprécier l’action initiée par l’association anti-raciste J’accuse ! Celle-ci lui demandait d’ordonner à 13 fournisseurs d’accès de bloquer le portail néo-nazi Front-14, hébergé en Alaska. Une fois n’est pas coutume, le juge de l’affaire Yahoo ! avait pris soin de lire sa décision en salle d’audience. Il a estimé que le litige n’était pas en mesure d’être jugé. "Certains penseront que c’est une demi-mesure, mais il y a nécessité d’approfondir le débat", a commenté Jean-Jacques Gomez, anticipant les critiques. Le juge des référés ne s’est pas pour autant défaussé de l’affaire. Il exige de J’accuse ! des précisions pour la prochaine audience.
Mettre en cause les auteurs
L’association devra ainsi "dresser la liste des sites hébergés par le portail Front-14 véhiculant un contenu manifestement illicite au sens de la loi française". Et "procéder à la mise en cause de l’hébergeur et du titulaire des sites raisonnablement identifiables, spécialement les sites français". Pour Jean-Christophe Le Toquin, représentant de l’Association des fournisseurs d’accès (AFA) assigné par les associations, la décision est de bon sens car elle remet les choses à leur place, en désignant les auteurs et les hébergeurs avant les fournisseurs d’accès. Une préoccupation partiellement partagée par certains observateurs qui se demandaient pourquoi on ne s’en prenait pas d’abord aux créateurs de pages racistes, en particulier s’ils sont français. Mais pour Alain Weber, l’avocat de la Ligue des droits de l’homme (qui s’est jointe à J’accuse !, avec quatre autres associations), le juge Gomez n’a pas "établi de hiérarchie". En d’autres termes, il n’a pas dit qu’il fallait d’abord obtenir un résultat auprès des hébergeurs avant de pouvoir exiger le blocage des sites. Alain Weber espère que la décision poussera les fournisseurs d’accès à "se placer sous la protection du juge" lorsqu’ils seront confrontés à des contenus illicites.
Urgent mais pas urgent
Jean-Jacques Gomez a donné rendez-vous à tout le monde le 4 septembre et proposé aux parties de faire venir des "grands témoins de l’Internet". Une mesure qui ressemble à s’y méprendre à l’appel aux experts fait par le juge lors de l’affaire Yahoo !. Et qui satisfait pleinement les hérauts de la cause anti-raciste sur le Net, maître Stéphane Lilti, avocat de l’Union des étudiants juifs de France, et Marc Knobel, fondateur de J’accuse ! Les deux n’ont pourtant pas obtenu ce qu’ils cherchaient : le blocage rapide de Front 14. "Le problème est urgent, mais ne peut être réglé dans l’urgence", affirme Stéphane Lilti qui tente par cette pirouette de justifier le fait d’avoir saisi le juge des référés. "Je ne suis pas pressé", confirme de son côté Marc Knobel, en rappelant qu’il a fallu dix mois pour obtenir une décision dans l’affaire Yahoo !.
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