Après la mort, hier, d’un jeune homme tué par la police, les anti-mondialistes, viennent d’entamer une vaste manifestation pacifiste. Elle doit se dérouler toute l’après-midi et demande, entre autres, l’arrêt du G8. De notre envoyé spécial Alexandre Piquard.
Et le G8 continue. À Gênes, au lendemain de la tragédie, cette absurdité est dans la tête de tous les militants anti-mondialisation. Comment les chefs d’...tats peuvent-ils encore avoir la lâcheté de continuer à discuter, bouclés dans leur bunker de la " zone rouge ", alors qu’un homme est mort ? Aucun de ceux qui se sont réveillés tôt ce matin avec, dans le crâne, le cauchemar de la veille, ne peut se l’expliquer.
Alors, avec tristesse, avec colère parfois, ils se sont mis en marche vers la via Caprera, la rue d’où est partie une vaste manifestation unitaire. On parle de 100 à 150 000 personnes et la foule est effectivement impressionnante. Ces militants appartiennent à des centaines d’organisations différentes, regroupées ou pas dans le Genoa Social Forum (GSF, Forum social de Gênes) qui coordonne déjà quelque 700 organisations opposées au sommet de Gênes. Ils demandent tous, sans violence, l’arrêt immédiat de la conférence du G8, et réclame la plus grande transparence dans l’enquête sur la mort de Carlo Giuliani, ce tout jeune homme qui, à 23 ans, s’est effondré sous les tirs d’un policier.
Marche pour la dignité
Ils sont sonnés ces jeunes militants. Sonnés et verts de fatigue. Eux qui pensaient venir faire la fête ; eux qui pensaient danser et chanter pour un peu plus de partage, de fraternité et d’humanité... Ils ont accrochés des bouts de sacs poubelle noirs à leurs bras, en guise de brassards de deuil. Sous le soleil, dans la chaleur d’un samedi d’été, ils essaient de reprendre du poil de la bête. Ils lancent quelques slogans. Ils se dirigent vers le centre, vers la "zone rouge"qui protège le G8 mais ils n’essaieront pas de la forcer. Ils ne tenteront pas de s’opposer aux 20 000 policiers qui ont repris position pour défendre la citadelle du G8. Ils espèrent seulement que les ultra-violents des "blocs noirs" ne vont pas se glisser dans leur rang. Ce matin, on parlait encore d’affrontement sporadiques mais violents entre casseurs et forces de l’ordre, notamment dans le quartier de la prison de Gênes et dans l’est de la ville où doit passer le cortège.
Pendant ce temps, dans leur bunker, les chefs d’...tat et de gouvernement achèvent leur déjeuner de travail sur la situation en Afrique, au Proche-Orient et dans les Balkans. Les jeunes de Gênes, eux, marchent seulement pour la dignité. Pour dire que face à la violence, à l’impossibilité de communiquer et au crime d’...tat, ils n’ont pas baissé les bras.