Les cyberflics de Mumbai n’ont pas hésité à user de méthodes "dures" à l’encontre d’un patron de cybercafé. Son crime : un pirate informatique s’était connecté de chez lui...
De tous les pays dits "émergents", l’Inde est probablement celui qui a su le plus, et le mieux, développer les compétences informatiques de ses concitoyens. Y compris en matière de piratage informatique. Le conflit qui oppose le pays au Pakistan voisin s’est ainsi moult fois retrouvé sur le WWW, où, à défaut de véritable "cyberguerre", des groupes de pirates des deux camps se sont opposés à coups de taggages ("defacements", comme ils disent en anglais) massifs de sites web. On apprenait également, récemment, qu’un certain Ankit Fadia, 16 ans, allait publier un Guide non-officiel du hacking éthique. "Pour se protéger des pirates, il faut savoir comment ils agissent. Je pense que chaque utilisateur d’ordinateur à notre époque devrait apprendre le piratage", déclarait-il alors à l’agence Reuters. Sa compilation de 600 pages de trucs et astuces, sont plus promptes à satisfaire les script kiddies que les vénérables hackers, mais témoigne, à tout le moins, du penchant certain d’un grand nombre d’Indiens pour les choses du hack. Mais quid des forces de l’ordre chargées de lutter contre le piratage informatique ? Dans un signal fort lancé à toute la communauté de l’underground informatique indien, rapporte Wired, l’unité chargée de la cybercriminalité aurait cassé la main d’un informaticien, entre autres actes qualifiés de "torture" par l’intéressé.
Mot de passe : Vijay
Mahesh Mhatre a l’insigne tort de posséder un cybercafé. Pas de chance, le Dr Neukar, alias Anand Khare, un ingénieur informatique de 23 ans, s’était connecté là-bas pour pirater, le 5 juillet dernier, les deux sites web de la Cellule de Cyber Crime (www.cybercellmumbaicity.com) de la police de Mumbai. Membre de GForce, l’un des groupes les plus actifs de la planète en matière de taggage de sites, le Dr Neukar voulait "démontrer à la police que leur site web n’était pas complètement sécurisé". Cela avait eu le dont d’énerver les cyberpoliciers, qui, aidé d’experts du secteur privé engagés par le CCC, se sont illico lancés à la recherche des coupables. Le Dr Neukar n’avait, alors, eu cesse de défier les policiers, allant jusqu’à appeler l’inspecteur en chef du CCC sur son téléphone portable, avant de démontrer à la presse l’incompétence du CCC : ses sites tournaient sous Windows NT, sans firewall (histoire d’en accélérer le chargement, dixit les policiers), et avec pour login, et mot de passe : "Vijay"(victoire en Hindi). En matière de "sécurité", on a effectivement vu mieux.
Je sais comment traiter les hackers
Le problème est que sur la piste du Dr Neukar, les cyberpoliciers sont tombés sur l’un de ses lieux de connexion : le cybercafé de Mahesh Mhatre. Et ils ne semblent pas y être allés de main morte. De son côté, le CCC admet avoir effectivement frappé Mhatre, mais nie l’avoir torturé. Cela n’a pas empêché le patron du cybercafé de saisir la commission en charge des droits de l’homme. Autant dire que le climat de confiance n’est pas au beau fixe entre hackers et (cyber)flics. Enfin, presque. Toujours selon Wired, de plus en plus de jeunes hackers postulent pour intégrer le CCC, préférant faire partie du côté "clair" de la force que de rester dans l’underground, et de prendre le risque de finir à l’ombre. Et Zahid, l’inspecteur chef du CCC, de préciser : "J’ai tué pas mal de terroristes avant d’être muté à Mumbai. Je ne dis pas que j’ai été sans pitié avec les hackers, mais je pense que nous, policiers, avons connu suffisamment de situations difficiles pour savoir comment traiter ces garçons." Les ...tats-Unis utilisent souvent le terme de terrorisme pour qualifier les actes de piratage informatique, quand bien même ils ne font aucun dégât, sinon en terme d’images. L’Angleterre, de son côté, a voté une loi antiterroriste qui place les hackers, mais aussi les activistes "anti mondialisation", au même rang que les poseurs de bombe. Au rythme où cela va, il faudra changer le proverbe : car si le ridicule ne tue pas, il blesse en tout cas.