Lassé des médias américains, un journaliste lance un site d’informations sur le trafic de drogue. Dans le même temps, aux ...tats-Unis, la Chambre des représentants discute une loi interdisant les liens vers des sites qui traitent de la drogue.
"Cet article a été réalisé depuis un endroit, dans un pays qu’on appelle Amérique"... Al Giordano, l’éditeur de narconews.com , termine toujours ses papiers par ces quelques mots. Il préfère que l’on ne sache pas où il se trouve : son travail pour narconews.com lui a déjà valu plusieurs menaces (coups de fil anonymes, lettres, agressions). Cet ancien journaliste du Boston Phoenix (il a aussi collaboré au Washington Post) est un spécialiste de la politique anti-drogue américaine.
Al a lancé son propre site le 18 avril dernier parce qu’il en avait assez de voir les vrais problèmes escamotés par la presse américaine. "Le public est vraiment mal informé sur la question de la drogue et du trafic en provenance d’Amérique latine. Mes concitoyens gringos pensent que les plus grands trafiquants sont latinos. Mais c’est faux, ils sont de New York ou Washington et blanchissent de l’argent à Wall Street", explique-t-il.
Casser la barrière de la langue
Narconews.com propose des traductions en anglais d’articles parus dans la presse latino-américaine, "pour qu’ils trouvent un écho dans les médias américains". "Il faut casser la barrière de la langue. La drogue est un fléau mondial et la réponse journalistique à ce problème doit aussi être mondiale. On peut y arriver grâce à Internet." Grâce à un réseau d’une centaine d’informateurs des deux côtés de la frontière Mexique-...tats-Unis, Al rédige également ses propres articles sur le site tout en continuant de collaborer à d’autres journaux. Il faut bien vivre...
68 000 connectés en trois semaines
Pourtant, Narconews, mis à jour quotidiennement, rencontre un succès certain : 68 000 connectés en trois semaines. Et les chiffres sont en hausse. Malgré tout, les internautes pourraient bientôt être privés de leur bulletin quotidien sur les drogues. La Chambre des représentants discute en effet en ce moment une loi sobrement intitulée Methamphetamine Anti-Proliferaction Act (votée par les sénateurs en 1999). Le texte veut interdire à tous les sites Internet de publier des informations ou même des liens sur les pages Web parlant de drogue. Une nouvelle occasion pour "Gringoland" de se couvrir de ridicule, selon Al Giordano. Quelques députés américains souhaitent amender ce projet, qui, dans ce cas, devrait repasser au Sénat, pour un nouveau vote. "Qu’ils nous censurent, conclut Al. Cela nous fera de la publicité gratuite."