En septembre 1995, Olivier Nicolas, alias « Old Nick », se connecte au Net. En février 1996, il crée un webzine, lorgane.com. En 1997, il fonde orgsex.com, un sex-shop en ligne. Interview d’un artisan du cybersexe, fervent supporter de la liberté d’expression.
Quels rapports entretiennent lorgane.com et orgsex.com ?
Des rapports sexuels, bien sûr ! À l’origine, en 1996, L’Orgsex était intégré à L’Organe : c’était le « petit supplément sexy » du site d’info satirique. Composée de quelques photos piquées sur les newsgroups et scénarisées avec de petits textes, cette partie du site attirait dix fois plus de visiteurs que la partie rédactionnelle. À partir de ce « triste » constat, j’ai décidé d’embrasser la noble carrière de pornocrate sur le Web, en essayant de faire un site X différent des autres : fun, décalé, inventif, moins ouvertement mercantile, et surtout moins vulgaire et misogyne que la plupart des sites de mes confrères dont les argumentaires ressemblent généralement à « Venez voir nos grosses salopes se faire défoncer la foune ! »
Et c’est rentable, ce type de site ?
Avec 7 000 visites uniques par jours et 3 000 abonnés, ma boîte Wonderland me fait vivre depuis trois ans, et j’ai embauché la charmante Marie-Ange. L’Organe, lui, était plus ou moins en sommeil - à part certains scoops, comme l’affaire Serge Humpich dont L’Organe avait eu la primeur. Mais je vais désormais pouvoir consacrer un budget à sa résurrection : une petite équipe de « vrais » journalistes anars et libertaires va le reprendre en main et lui fournir du contenu explosif...
Ce concept loufoque, alternant l’info et le cul sur deux sites, distincts et pourtant frangins, me plaît : ça m’éclate de pouvoir me payer le luxe de financer un vrai webzine satirique et sans concession sans avoir à composer avec des annonceurs ou investisseurs. Grâce au cul, L’Organe est libre d’ouvrir sa grande gueule et d’emmerder les méchants, les hypocrites et les cyniques...
Comment avez-vous vécu l’arrivée et l’évolution du X sur le Web ?
Ça désespère les idéalistes coincés et les pères et mères la pudeur, mais c’est une réalité contre laquelle il est inutile de lutter : dès qu’il y a un espace de liberté qui se crée quelque part, hop, les pornocrates viennent s’installer et exploitent le filon à des fins commerciales. Je ne vois pas où est le problème, le sexe est un divertissement respectable, et les grands pornocrates (Larry Flynt, Hefner...) sont souvent de vrais démocrates de tendance libertaire. De plus, c’est souvent l’industrie du porno qui fait avancer la technologie, dans la mesure où les clients sont toujours demandeurs de plus de qualité technique (diffusion vidéo, live-shows, etc.).
Autre chose qui m’amuse beaucoup : aujourd’hui, même les entreprises les plus éminentes et respectables se mettent à faire du cul sur le Web ! Parce qu’elles ont bien compris que c’est à peu près le seul secteur aujourd’hui économiquement viable sur le Net. Par exemple, il y a un an, j’avais contacté CanalWeb pour leur proposer de créer une chaîne sexy. À l’époque, refus catégorique sur l’air du « Monsieur, pour qui nous prenez-vous, nous ne ferons jamais ça ! » Aujourd’hui, CanalWeb vient de lancer MySexyTV.com... Et je travaille avec eux sur plusieurs émissions !