Il n’y aura pas de fusion Alcatel-Lucent. Mardi 29 mai, les deux géants des télécommunications ont reconnu l’échec des négociations finales qui se tenaient depuis la semaine dernière au château des Mesnuls, non loin de Paris. Motif : désaccord sur le nombre de sièges attribués à Lucent au conseil d’administration, six, contre huit à Alcatel. Selon le Wall Street Journal, le P-DG de Lucent, Henry Schacht, qui était pourtant venu démarcher son homologue Serge Tchuruk dès mars, a préféré tourner le dos à Alcatel plutôt que d’être racheté : "L’idée de M. Schacht, c’était qu’Alcatel et Lucent créaient une nouvelle entreprise - pas que Lucent deviendrait une unité d’Alcatel. Et la raison pour laquelle il était prêt à accepter que l’échange d’actions se fasse sans prime par rapport au cours de Bourse actuel de Lucent, [sans avantage direct pour les actionnaires de Lucent ], c’était qu’à ses yeux, l’entreprise prenait part à une fusion entre égaux." Le projet de "fusion" avait, en effet, été ramené à 22,8 milliards de dollars (170 milliards de francs), soit la capitalisation boursière de Lucent (moins la spinoff Agere), alors qu’avaient précédemment été évoquées des rumeurs de prime sur le dernier cours. Le hic, pour Lucent : sa capitalisation a sérieusement piqué du nez ; en d’autres temps elle atteignait la valeur stratosphérique de 285 milliards de dollars. Un peu rageant, de se faire racheter à vil prix...
Lucent dans le rouge
Henry Schacht n’est pas tiré d’affaire pour autant. Le désengagement des négociations fait non seulement chuter les cours de Bourse des deux sociétés, mais il laisse surtout Lucent dépourvu d’issue pour régler ses problèmes financiers. Selon le New York Time, Lucent a le cash (4,9 milliards de dollars, 36,5 milliards de francs) nécessaire pour tenir jusqu’à la fin de l’année. L’entreprise pourra aussi monnayer sa filiale optique pour 5 à 6 milliards de dollars (37 à 45 milliards de francs). Mais qui croit encore que Lucent peut s’en tirer seul ? Selon le quotidien new-yorkais, Siemens et Nokia n’étaient pas intéressés par une fusion avec Lucent au moment où Alcatel a commencé à discuter. Quant à cette dernière société, cet échec risque également de lui causer du tort - à un degré moindre. Son projet d’expansion sur le marché nord-américain tombe à l’eau. La constitution d’une entreprise géante devait également rassurer les marchés financiers échaudés par les problèmes des entreprises de télécommunications... C’est donc une déconvenue pour tout le monde. À moins qu’Alcatel et Lucent se donnent rendez-vous un peu plus tard ?