La condamnation de Yahoo ! par un tribunal français laisse quasiment de marbre la presse américaine. En France, en revanche, deux associations du Net (l’IRIS et l’AFA) témoignent d’une forte d’inquiétude.
Même à l’heure d’Internet, Paris reste très loin de l’Amérique. Ainsi, la condamnation lundi 22 mai de Yahoo ! par le tribunal de grande instance de Paris pour avoir présenté sur son site d’enchères des objets nazis (voir article) est passée quasiment inaperçue dans la presse américaine. Dans Wired (http://www.wired.com), une dépêche de l’agence Reuters rappelait seulement l’obligation pour Yahoo ! de se débrouiller pour que les internautes français ne puissent accéder à son site. Le lendemain, le même journal attirait l’attention sur la réaction de Yahoo ! France. Le journal The Standard a lui aussi repris les papiers de l’agence de presse en soulignant seulement que ce jugement créait un dangereux précédent...
Difficile techniquement
En France, en revanche, les réactions n’ont pas tardé. Jean-Christophe Le Toquin, délégué permanent de l’AFA (Association des fournisseurs d’accès), attire, à juste titre, l’attention sur une question centrale : comment empêcher techniquement les internautes français d’accéder au site d’enchères de Yahoo ! ? L’association expose quatre cas dans lesquels l’identification technique des internautes est quasi impossible :
le nom de domaine du fournisseur d’accès est en ".com", ".org", ".net" ;
l’utilisation successive par des citoyens de pays différents des adresses IP (Internet Protocol) du fournisseur d’accès ;
le navigateur de l’abonné est configuré dans une autre langue que le
français, ou bien encore ;
- l’abonné utilise un relais Web qui dissimule sa provenance.
Jean-Christophe Le Toquin conclu ainsi : "Dès lors, vouloir enjoindre à un prestataire étranger de filtrer efficacement l’accès des citoyens français à des contenus, licites dans son pays mais préjudiciables en France, est illusoire."
Procès ou boycott ?
De son côté, la réaction de l’IRIS (Imaginons un réseau Internet solidaire) se fait nettement plus virulente : elle intitulait ainsi son communiqué "Cachez cette svastika que je ne saurais voir".
Si l’association s’appuie de la même façon que l’AFA sur un argumentaire technique, elle qualifie la décision du juge Gomez "d’absurde". Elle critique également le mode d’action employé par l’UEJF (Union des étudiants juifs de France) et la LICRA (Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme) dans cette affaire. Autrement dit, le recours en justice. Pour elle, une action de boycott organisée par la Licra aurait été "une réponse morale plus intelligente et sûrement plus efficace". D’autant qu’elle aurait pu conduire Yahoo ! à subir des pertes financières...