TRANSFERT S'ARRETE
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Des chercheurs en informatique de l’université de Rochester travaillent à la mise au point d’un appareillage permettant de contrôler les déplacements d’un véhicule par... la pensée.
Imaginez, vous êtes en voiture, à la place du conducteur, et vous roulez en ville. Brusquement, le feu passe au rouge et, sans que vous ayez fait fait le moindre geste, la voiture stoppe. Pas parce que vous avez calé, ni parce que le feu rouge lui a envoyé un message lui disant de s’arrêter, mais parce que VOUS avez vu le feu rouge, que VOUS savez qu’il faut marquer l’arrêt au feu rouge et que votre voiture a lu dans vos pensées.
Bon, nous n’en sommes pas encore là, mais une telle voiture pourrait bien voir le jour d’ici quelques d’année si l’on en croit Jessica Bayliss et Dana Ballard, deux chercheuses du département informatique de l’université de Rochester. Elles viennent en effet de tester dans un environnement virtuel un système qui permettra un jour de contrôler par la simple pensée les déplacements d’un objet dans le monde réel.
"Traces électriques" ?
Rassurez-vous, il n’est pas question ici de parapsychologie : grâce à un électro-encéphalographe (EEG, une sorte d’électrocardiographe, mais que l’on se met sur la tête), Bayliss et Ballard peuvent mesurer et interpréter des "traces électriques" que laissent les "pensées" au niveau du scalp. Ainsi, les neurobiologistes savent depuis 30 ans que la présentation d’un stimulus inhabituel mais attendu (un krach boursier par exemple) provoque, après un délais de 415 millisecondes, une ondulation électrique stéréotypée du cerveau que l’on sait parfaitement caractériser et que les neurologues appellent P300. Ce que souhaitait vérifier l’équipe de Rochester, c’est que cette P300 était bien la signature univoque d’une pensée "de surprise attendue" ; ceci afin de lier sans ambiguïté l’apparition de cette P300 à une réaction soit du sujet soit de ses outils (ordinateur, véhicule, etc.) et parvenir ainsi à un vrai système de commande télépathique.
Expérience virtuelle
Leur première série d’expériences ont été menées sur des sujets immergés dans un environnement virtuel. Ces derniers portaient un casque VR (Virtual Reality) doté de capteurs de mouvement de la tête et des yeux, relié à un ordinateur et qui projetait une image 3D d’une ville virtuelle. Par ailleurs, le casque assurait également la fonction d’EEG afin de permettre de suivre en temps réel l’activité électrique du cerveau et de reconnaître les ondes de type P300. Les sujets devaient évoluer dans cet environnement grâce un volant et étaient par ailleurs informés que lorsqu’ils verraient un feu de circulation passer au rouge, ils devaient s’arrêter. D’après Bayliss, l’événement "feu rouge" est suffisamment inhabituel mais attendu pour provoquer une P300. C’est précisément ce qui a été observé dans près de 80 % des cas, mais surtout on a constaté que l’apparition de signaux surprenants, mais non signifiants (comme une lumière jaune par exemple), ne déclenchait pas cette onde.
Connexion à un joypad
Ce dernier constat est problématique si l’on veut un jour utiliser le phénomène pour concevoir des voitures télépathes : le système doit pouvoir fonctionner sans fausses alertes, il importe donc que l’apparition de la P300 soit bien spécifique à une pensée (ici quelque chose du genre "tiens un feu rouge, tiens je devrais m’arrêter"), sinon l’on risque soit de passer pour un chauffard indécis, soit pour un stroboscope. D’après Jessica Bayliss, ce problème devrait être résolu en optimisant les algorithmes des logiciels qui identifient en temps réel des P300, et en entraînant les sujets à penser "clairement" (c’est-à-dire rester suffisamment concentrés sur leur tâche et ne pas se laisser distraire par des "surprises" non attendues).
Une fois ces améliorations apportées, on pourra alors connecter ce système de détection à un Joypad, une télécommande ou un système d’exploitation comme Windows et tout se passera comme si vous manipuliez les objets... mais sans les toucher, juste en y pensant. Nous n’y sommes pas encore mais c’est peut-être pour après-demain.